Quelles furent les spécificités des conflits coloniaux engagés par la France en Afrique du Nord et ailleurs ? Que nous apprennent les méthodes singulières - enfumades, massacres de prisonniers et de civils, razzias, destructions de cultures et de villages - couramment employées par les militaires français sur la nature de la guerre conduite pour pacifier l´ancienne Régence d´Alger ? Pourquoi de nombreuses mesures racistes et discriminatoires ont-elles été élaborées puis appliquées au cours de la conquête et de la colonisation de l´Algérie ? Comment furent-elles codifiées sous la Troisième République puis étendues aux nouveaux territoires de l´empire tels que l´Indochine, la Nouvelle-Calédonie et l´Afrique-Occidentale française ? Telles sont quelques-unes des questions auxquelles cet ouvrage entend répondre. En effet, la conquête puis la colonisation difficiles et meurtrières de l´Algérie doivent être considérées comme une sorte de vaste laboratoire au sein duquel des concepts - ceux de «races inférieures», de «vie sans valeur» et d´«espace vital», promis à l´avenir et aux usages que l´on sait - furent forgés. De même, on découvre les origines de nouvelles techniques répressives - l´internement administratif et la responsabilité collective notamment - qui, avec le Code de l´indigénat adopté en 1881, firent de l´Etat colonial un état d´exception permanent. Plus tard, l´internement fut même importé en métropole pour s´appliquer, à la fin des années 1930, aux étrangers d´abord, aux communistes ensuite puis aux Juifs après l´arrivée de Pétain au pouvoir. S´appuyant sur quantité de documents peu connus voire oubliés, sur la littérature aussi, cette étude originale et dédisciplinarisée éclaire d´un jour nouveau les particularités du dernier conflit qui s´est déroulé entre 1954 et 1962, mais aussi les violences extrêmes et les guerres totales qui ont ravagé le Vieux Continent au cours du XXe siècle.