L'apparition, au tournant des années 2000, de nombreuses maisons d'édition (dont Marchand de feuilles en 2000 ; Le Quartanier et Rodrigol en 2002 ; Alto et Ta mère en 2005 ; Héliotrope en 2006 ; La Mèche en 2010 ; Le Cheval d'août en 2014 pour n'en citer que quelques-unes), a été saluée comme « une renaissance » de la littérature du Québec. L'ampleur du phénomène et sa concentration dans le temps incitent à voir dans ce changement du paysage éditorial québécois une transformation susceptible d'affecter également et proportionnellement la pratique littéraire, tant sur le plan esthétique de la production que sur le plan critique de la réception. C'est l'hypothèse que ce dossier souhaite mettre à l'épreuve en confrontant l'étude de quelques-unes des pratiques éditoriales de ces nouvelles maisons à l'analyse de deux enjeux critiques majeurs de la littérature québécoise, l'identité et la langue, interrogés dans des corpus contemporains. En éclairant certains aspects du fonctionnement de maisons d'édition dont la création, en une décennie, constitue l'un des réaménagements les plus visibles du champ littéraire, ce dossier souhaite en interroger les conséquences pour la fiction narrative des années 2000 au Québec. Il propose une première réflexion, forcément exploratoire, sur la nature et l'étendue des changements qui s'opèrent et sur les critères qui permettent de les mesurer.
Être contemporain c'est, au premier chef, être de son temps (ou en avance sur lui) et produire une oeuvre qui puisse être reçue parmi celles qui constituent le coeur vivant de la période la plus actuelle. Cet ouvrage se penche sur la question du contemporain, aussi bien du point de vue du discours critique qui le définit que des pratiques littéraires qui s'y rattachent, en prenant pour objet le discours narratif tel qu'il s'est déployé au Québec et en France depuis le tournant des années 1980.
Les auteurs rendent d'abord compte des thèmes et des mécanismes de valorisation qui marquent la critique littéraire, puis présentent des oeuvres qui exemplifient certaines concrétisations esthétiques et poétiques d'un nouvel art narratif. En se situant au confluent des réflexions françaises et québécoises, ils font dialoguer ces deux corpus et tentent de répondre aux questions suivantes : la notion de contemporain désigne-t-elle un même phénomène en France et au Québec ? Recoupe-t-elle la même réalité là-bas et ici ? Ces acceptions « nationales » se contaminent-elles, s'influencent-elles ? Entre vision panoramique et attention aux particularités des oeuvres, cet ouvrage soulève des points de contact et de divergence entre les deux littératures.
Ce numéro de la revue Voix et images se penche sur les expériences contemporaines du temps dans les fictions québécoises. Cette expérience est étroitement liée à la question de la mémoire (et donc de l'Histoire), sans pouvoir s'y résumer totalement, ainsi qu'à celle de l'avenir qui prend la forme d'une intensification du présent ou pire, celle d'une catastrophe annoncée amenant la fin de l'humain. On comprend alors que l'individu contemporain se trouve en quelque sorte prisonnier du présent, poussé à réfléchir le rapport au temps, à son temps. La question des expériences du temps ne se laissant pas aisément saisir, collaborateurs et collaboratrices ont pris des chemins détournés pour en apprécier toutes les nuances, soit celle de l'imaginaire western pour Andrée Mercier, de la mémoire pour Marion Kühn, de l'histoire pour David Bélanger, de la biographie pour Pierre-Olivier Bouchard et de la figure du héros pour Manon Auger.
En dépit de l'hétérogénéité des pratiques et des esthétiques, la cartographie de la production narrative contemporaine à laquelle s'emploie la critique depuis quelques années met au jour des modalités inédites d'instauration et de contestation du pacte romanesque. Toute l'adhésion au raconté se trouve ainsi délibérément mise en procès dans le roman contemporain, au gré de formulations diverses qui touchent tant les propositions thématiques que leurs expressions figurales.
Peut-on tenter de systématiser les mécanismes qui engagent une telle problématisation de la transmission narrative ? Dans cette perspective, et afin d'approfondir l'examen des modalités formelles du paradigme narratif, la question est étudiée sous divers angles théoriques par une vingtaine de chercheurs du Québec, du Canada, de la France et des États-Unis. L'étude de romans parus depuis 1990 permet d'explorer la diversité des stratégies qui réinventent la transmission narrative en jouant de la séduction d'une voix, de la déstabilisation de l'autorité narrative, ou de la déconstruction plus ou moins subreptice de l'adhésion.
Avec des textes de : René Audet, Yves Baudelle, Bruno Blanckeman, Emmanuel Bouju, Jean-François Chassay, Robert Dion, Frances Fortier, Bertrand Gervais, Barbara Havercroft, Pierre-Luc Landry, Francis Langevin, Andrée Mercier, Jean Morency, Warren Motte, Christine Otis, Marilyn Randall, Pascal Riendeau, Pierre Schoentjes, Phillip Schube-Coquereau, Nicolas Xanthos.