Depuis trois décennies, le terme de « barbares » a fait l'objet d'un intérêt accru. Alors que la plupart des travaux universitaires portaient jusque-là sur les civilisations bien documentées par les sources écrites, une attention nouvelle a été accordée aux espaces jugés extérieurs, aux zones de contact, aux pratiques d'échanges et aux formes de la représentation mutuelle. Le barbare apparaît aujourd'hui moins comme l'ennemi irréductible du « civilisé » que comme un autre, que l'on doit construire par des dispositifs multiples et qui s'avère nécessaire pour se définir soi-même.Sous une forme proche d'un dictionnaire, ce livre étudie ainsi la création et l'exploitation de cette altérité à travers des exemples précis pris dans l'histoire mondiale. Les domaines explorés sont multiples : linguistique, philosophie, sources textuelles, archéologie, histoire de l'art, lieux de mémoire, personnages historiques, droit, culture matérielle, ethnographie, sociologie, historiographie, muséographie, représentations médiatiques...
L'épisode inaugural de l'histoire de France est aussi le plus évanescent : du baptême de Clovis on ne connaît à la vérité ni le lieu, ni la date, ni les circonstances précises, ni même la portée immédiate. C'est l'écriture de l'histoire qui devait, au fil des siècles, en faire la scène originelle de notre légendaire national. Cette cérémonie bien réelle reste encore aujourd'hui recouverte d'épaisses couches de mythes et de fables.
Peut-on retrouver la véritable figure de ce "roi très glorieux" qui, au crépuscule de l'Empire romain, a épousé la foi catholique, bientôt suivi d'une partie de son peuple ? Tel est l'objet de ce livre : il explore les traces fugaces d'une Gaule en mutation entre le passé romain et la civilisation médiévale ; il convoque les ressources de l'archéologie pour approcher les hommes et les paysages que Clovis allait unifier ; il s'efforce de composer l'histoire de ce peuple franc appelé à fonder une nation chrétienne. C'est cette reconstitution qui confère à la journée lointaine où "naît la France" sa véritable dimension politique et mémorielle.
Plusieurs récits sont possibles, que cet ouvrage revisite. Autour de Clovis, mémoire et histoire souvent s'entremêlent au service de partis et de passions que chaque époque fait naître. L'irréductible part de mystère de ce baptême des origines aura ainsi contribué à son extraordinaire postérité.
Entre la fin de l'Antiquité et le début du Moyen Âge, des peuples aux noms mystérieux apparaissent en Europe : Ostrogoths, Wisigoths, Vandales, Francs.... D'où viennent ces conquérants ? Pourquoi ont-ils détruit l'Empire romain qui les fascinait pourtant ?
L'épopée des Barbares ne se résume pas à la violence de guerriers armés de haches, buvant leur bière dans le crâne de leurs ennemis. Autour de rois et de reines hors du commun, ils ont mis en place une société riche et complexe, dont on retrouve encore la marque aujourd'hui.
Brutes sanguinaires ? Seigneurs des anneaux ? Qui sont les Barbares ? C'est à ce passionnant retour aux origines de notre civilisation qu'invite Bruno Dumézil dans cet ouvrage.
Pourquoi l'Europe est-elle devenue chrétienne ? Une évangélisation pacifique des populations a bien évidemment existé ; mais très tôt la force, et notamment la force publique vint s'ajouter ou se substituer au pouvoir de conviction des prédicateurs. Malgré la qualité de leur appareil législatif et administratif, les empereurs romains ne parvinrent cependant jamais à convertir l'ensemble de leurs sujets. Lorsque le dernier d'entre eux fut déposé en 476, l'Occident passa définitivement sous la domination de rois germaniques, dont à cette date aucun n'était catholique. Les politiques civiles de coercition religieuse disparurent et l'on put même douter que le christianisme survive à l'anéantissement de l'Empire.
Pourtant, trois siècles plus tard, l'Europe ne connaissait plus qu'une seule religion, le christianisme, et dans sa variante catholique, non pas arienne. Pour les contemporains, le phénomène parut mystérieux, car il était paradoxal. Les peuples barbares, vainqueurs de la puissance romaine, avaient accepté de se soumettre à la religion de leurs vaincus De façon plus extraordinaire encore, des évêques isolés et des législateurs d'États embryonnaires étaient parvenus à réaliser ce que Rome n'avait pas même rêvé d'accomplir. Comparer l'ampleur des réalisations à la modestie des moyens ne peut qu'amener à réviser l'idée que le christianisme a été imposé par la force. À moins que notre définition de la contrainte religieuse se révèle imparfaite face aux mentalités de ces siècles obscurs... Dans un âge d'inquiétude, la participation collective à des rituels d'unanimité ou la reconnaissance de signes surnaturels ont pu fléchir les consciences, sans pour autant les violer. De multiples facteurs sociaux, économiques ou culturels et intellectuels se sont superposés, comme autant de formes de pression subtiles qui amenèrent les individus au baptême (l'attitude changeante des monarques barbares envers les juifs fournit aussi quelques intéressants points de comparaison.).
Étendue dans l'espace à toute l'Europe occidentale sur pas moins de trois siècles, cette enquête rigoureuse et nuancée restitue ainsi le passage de l'Occident au christianisme dans toute sa complexité. En multipliant les angles de vue, elle propose une nouvelle approche du concept de liberté religieuse en un temps où convaincre et contraindre ne constituaient pas nécessairement des démarches opposées. Ce livre fera date.
Comment Léger, évêque franc déposé pour haute trahison dans les années 670, a-t-il mérité de parvenir à la sainteté ? Et pourquoi ce prélat controversé a-t-il donné son nom à près de 55 communes françaises ?
Composées peu de temps après sa mort, les deux premières Passions de Léger d'Autun offrent un ensemble considérable de textes pour les décennies les moins documentées de l'époque mérovingienne. Ces oeuvres empruntaient une nouvelle voie de l'hagiographie occidentale en présentant l'élimination d'un évêque influent comme un martyre authentique. Pour ses biographes, Léger constituait pourtant un personnage problématique. Aussi sa chute est-elle connue par le témoignage de ses proches, très complaisants, mais aussi par celui de ses adversaires locaux, qui ont essayé a posteriori de dissimuler leur propre responsabilité. La réhabilitation de Léger a suscité en outre la réaction de membres de factions rivales, qui entendirent affirmer la sainteté des morts de leur propre parti.
En raison de retournements politiques, le culte de Léger fut assuré d'un large succès dès les années 680. La translation et la diffusion des reliques contribuèrent encore à son rayonnement, notamment en Artois, en Poitou et dans la région de Chartres. Le culte marqua en revanche le pas à Autun, ancien siège épiscopal de Léger. Nul n'est prophète en son pays.
Constituée depuis 2008, l'équipe HagHis (Hagiographie & Histoire) réunit des historiens, des littéraires et des philologues, autour de l'étude des textes hagiographiques du haut Moyen Âge occidental et est animée par Bruno Dumézil, maître de conférences à l'université Paris Ouest Nanterre La Défense.
"Pour la première fois, l'éditeur des savoirs, les Presses Universitaires de France, et la maison de disques culturels de référence Frémeaux & Associés, s'associent pour proposer des cours particuliers sur l'histoire de France, racontée, expliquée et analysée par les plus grands universitaires.
En près de cinq heures, cet enregistrement retrace l'histoire de France depuis les Gaulois jusqu'à la fin de l'empire carolingien, incarnée par Bruno Dumézil, spécialiste d'histoire médiévale."
Claude Colombini-Frémeaux
"Est-il vraiment nécessaire de présenter Charlemagne ? C'est l'un des rares personnages connus du Moyen Age. Si l'Empereur nous est si familier c'est que son héritage a été revendiqué depuis la dynastie carolingienne, jusqu'à la construction de l'Union Européenne en passant par les rois de France, le Saint Empire, ou encore Napoléon. Mais au-delà du personnage de légende mobilisé et remodelé à travers les âges au gré des besoins politiques, qu'en est-il du personnage historique ?
Bruno Dumézil retrace dans ce coffret l'histoire de Charles Ier, qui ne fut jamais nommé Charlemagne de son vivant, l'histoire d'un roi qui prit la dignité impériale et ravit l'autorité chrétienne à Constantinople. Un Empereur qui réunifia l'Occident chrétien morcelé depuis la chute de l'Empire romain d'Occident."
Claude Colombini Frémeaux
Partie 1 : L'Empire de Charlemagne - Le royaume franc mérovingien - Charles Martel - Pépin le Bref - Les francs au secours du Pape - Charlemagne à la mort de Pépin - L'armée carolingienne - Les campagnes de conquête.
Partie 2 : Le rétablissement de l'Empire romain - Les pouvoirs de l'empereur et roi des francs - Le plaid et le lien avec les élites locales - Contrôler le dogme et le clergé - Nouvelles églises et organisation du village médiéval - Les réformes monastiques.
Partie 3 : La renaissance carolingienne ? - L'académie Palatine - Les centres d'études - Retrouver « le texte » de la Bible - Produire des livres en grande quantité - La légende de Charlemagne - Une figure européenne aux mémoires multiples.
À l'empereur romain ayant une autorité absolue sur ses fonctionnaires, on oppose souvent l'image du roi médiéval aidé, conseillé ou trahi par ses vassaux. L'État antique se serait effondré, brutalement et presque totalement, lorsque ses agents auraient perdu la notion de service public pour lui préférer un engagement personnel rémunéré par une terre.
En réalité, la fonction publique n'a pas disparu avec le dernier empereur d'Occident mais les désordres du V siècle l'ont affectée. Elle n'a définitivement succombé qu'entre le milieu du IX siècle et l'an mil. Pendant cinq siècles, la militia le corps des serviteurs de l'État a tour à tour été inventée, favorisée, délaissée et reconstituée.
Sur la longue durée, la fonction publique apparaît comme un cadre administratif qui a épousé avec plus ou moins de bonheur la société de son temps. Si l'union a été fusionnelle à l'époque romaine, c'est plutôt une alliance d'intérêt que l'on décèle aux premiers temps mérovingiens.
Au milieu du VIIIe siècle, les Carolingiens forcent l'aristocratie franque à passer sous le régime de la militia, tandis que, cent ans plus tard, le roi Charles le Chauve ne parvient pas à unir la société médiévale et la fonction publique : celle-ci ne survivra pas à cet échec.
Quatre mariages et un enterrement, voilà qui pourrait résumer l'histoire du service public au cours du premier millénaire...
Les Barbares ont une drôle de réputation. Les penseurs de la Renaissance leur imputent le naufrage de la seule véritable civilisation : Rome. Les historiens du XIXe siècle leur octroient volontiers l'origine des nations européennes : les Angles n'ont-ils pas donné leur nom à l'Angleterre, les Francs à la France ? Si les chercheurs actuels ont bien abandonné ces présupposés, leur travail historique reste délicat : les populations vivant au nord du Rhin et du Danube ne maîtrisaient pas l'écrit pendant toute l'Antiquité et l'apport considérable de l'archéologie ne compense qu'en partie cette quasi-absence de textes. Une chose est sûre aujourd'hui : le modèle explicatif des « grandes migrations » n'est pas le bon. Il ne permet notamment pas d'appréhender le processus qui a abouti à la création de nouvelles identités ethniques métissées autour desquelles se sont forgés, lentement, de nouveaux peuples.
À la fin de l'Antiquité et durant le Moyen Âge, peut-on considérer la lettre comme une arme de guerre ? Depuis plusieurs années, différents programmes européens de recherches explorent les ressources de l'art épistolaire, qui sert tout autant à maintenir le lien entre des amis éloignés qu'à alimenter la haine ou la controverse entre des protagonistes qui ne peuvent, ou ne veulent, se rencontrer. Le présent volume propose de réfléchir sur un temps long aux modalités épistolaires des conflits, à leur mise en forme et en mots, ainsi qu'à leur gestion mémorielle, afin d'éclairer les continuités et ruptures sur la période choisie, du ive au xve siècle, en combinant les approches historique et littéraire et articulant l'étude du contenu et à celle du contenant.
Thème central d'un point de vue historique, historiographique et méthodologique, c'est d'abord une représentation des historiens héritée de modèles antiques ou modernes