« Bouchère, oui, mais avec panache, avec cette précision, cette correction, cette sagesse et ces scrupules. Avec beauté et vérité. Comme avec révérence. J'aimais ce métier, je n'aurais pas su dire pourquoi. C'était confus, cela l'avait toujours été. Je n'avais jamais cherché à comprendre trop précisément, je craignais d'éclaircir, de tomber sur des désirs énormes, sur des pulsions trop noires, j'évitais d'y penser. »
La narratrice de ce roman n'existe que par et pour sa profession : elle est bouchère et regarde passer la vie derrière son comptoir aux côtés de son jeune apprenti, Patrice.
La boutique tourne si bien qu'un jour il devient nécessaire de faire appel à une troisième recrue. Arrive Myriam, qui sinstalle dans la boucherie.
Avec elle, l'histoire change de rythme, les tensions s'exacerbent. Après la visite d'un abattoir, les langues se délieront, libérant une parole qui précipitera le drame.
Johnny, c'est l'histoire d'un éternel retour vers l'amour perdu de la jeunesse... C'est une histoire qui se raconte en images, dans un paysage de western grandiose. Oui, c'est l'histoire bien connue de Johnny Guitare, dont on reconnaît soudain la silhouette de cow-boy chevauchant sur la route d'Albuquerque à travers les rafales de vent... Comme dans le film mythique de Nicholas Ray, il revient de loin. Il revient vers Vienna, la jeune femme qui ne l'attend plus depuis tout ce temps... Vienna dont la beauté a fini par prendre l'éclat trop dur d'une pierre précieuse abandonnée en plein soleil, Vienna règne seule à la tête de son saloon comme sur les hommes qui guettent en vain son regard. Mais voilà que Johnny revient... Et soudain le désir de tout recommencer est là, au milieu des face-à-face tendus et des coups de feu mortels : le désir qui se communique hors champ et fait se retourner la caméra sur une autre Vienna, transformée en maquisard des années quarante. De son amour est née une enfant, aujourd'hui adulte. C'est sa voix qui nous raconte, qui nous fredonne l'éternelle énigme de cette silhouette qui revient par-delà les ravages du temps. Une histoire d'amour au souffle épique qui remonte le film de la mémoire jusqu'au premier regard. Productrice à France Culture pendant quinze ans, Catherine Soullard est critique de cinéma et auteur des romans Palmito d'Evian (Calmann-Lévy, 2001)) et Bouchère (Calmann-Lévy, 2006).
"Deux kilos de pommes vertes, une botte de poireaux, cinq tomates bien fermes, un pied de basilic, trois kiwis, quelques pommes de terre, des oranges, de l'ail, des oignons blancs, deux barquettes de framboises et une de groseilles et puis un ananas, un gros. Au moment de payer, tu as bien entendu, c'était cent cinquante francs qu'il eût fallu marquer, oui, bien sûr, tu avais bien compris et tu allais le faire, poser le sac ici, prendre ton chéquier, ouvrir le carnet, prendre le stylo aussi, t'appuyer au comptoir, inscrire le 1, le... le 5 ne vient pas, tu ne peux pas, ta main n'avance plus, elle ne veut rien savoir. Tout se brouille, c'est le monde qui s'en va, se retire et te laisse. C'est fini, tu es seule."
Une femme rend visite à sa mère, qui souffre des séquelles d'un accident cérébral, dans une maison de retraite à Marseille. Elle tente de percer le mur qui enferme sa mère dans ses manies obsessionnelles, pour retrouver la femme rayonnante qu'elle fut. Peine perdue. Entre colère et résignation, tendresse et exaspération, mauvaise conscience et souvenirs déchirants, entre rire et larmes, la narratrice relate ces quelques heures passées avec cette drôle de mère. Une écriture frémissante et sans concessions ; l'aveu publique, lucide, quelquefois cruel, d'un difficile et sombre amour.