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Collège de France
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Écologique, sanitaire, énergétique, économique, sociale, humanitaire, démocratique : les crises sont une composante essentielle du monde contemporain. Si les sciences sociales peuvent aider à les comprendre et à les résoudre, leur rôle est également d'interroger le langage de la crise, d'analyser l'écart ou la convergence entre la réalité et sa représentation : nommer ou taire une crise, l'exagérer ou la minimiser sont autant de procédés générateurs d'affects, de temporalités, d'omissions aux conséquences majeures qu'une pensée critique se doit de décrypter. S'appuyant à la fois sur les trajectoires de vie de figures célèbres des sciences humaines et sur des recherches conduites autour de faits éloquents du présent, cette leçon inaugurale, qui s'adresse à toute citoyenne et tout citoyen, pose les jalons d'une vaste réflexion éthique et politique dont l'époque ne cesse de démontrer la nécessité.
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« Comment traite-t-on les vies ? Que fait-on des morts ? Ou plutôt, que dit d'une société la manière dont elle considère certaines vies, vies de travailleurs, vies d'exilés, vies de prisonniers, vies rendues vulnérables, inégales ? Et que révèlent de ses valeurs la façon dont meurent certains de ces travailleurs, certains de ces exilés ou certains de ces prisonniers, la façon dont on les laisse mourir ou dont on les expose à la mort, la façon dont on détourne les yeux de leur condition ou dont on se mobilise pour les protéger ? Au fond, comment se définissent les économies morales de la vie et de la mort dans le monde contemporain ? Telles sont les questions posées dans ce livre à propos de trois objets au regard desquels elles s'avèrent particulièrement pertinentes : le travail, l'exil et la prison. Ce choix n'est pas neutre. Il vise à éclairer des lieux où, souvent, la précarité des vies est rendue invisible et la douleur des morts indicible. » Issu du colloque qui s'est tenu au Collège de France en juin 2021, ce volume réunit des anthropologues, des historiens et des sociologues dont le travail tant empirique que théorique interroge avec force et clarté les problématiques fondamentales de notre société.
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« Il y a, d'un côté, la vie qui s'écoule avec un commencement et une fin, et de l'autre, la vie qui fait la singularité humaine parce qu'elle peut être racontée. On pourrait ainsi parler de vie biologique et de vie biographique. L'espérance de vie mesure l'étendue de la première. L'histoire de vie relate la richesse de la seconde. L'inégalité des vies ne peut être appréhendée que dans la reconnaissance des deux. Elle doit à la fois les distinguer et les connecter. Les distinguer, car le paradoxe des femmes françaises montre qu'une vie longue ne suffit pas à garantir une vie bonne. Les connecter, car l'expérience des hommes afro-américains rappelle qu'une vie dévalorisée finit par produire une vie abîmée. C'est ainsi que se pose également la question des réfugiés et des migrants. »
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De modo que, por un lado, está la vida que transcurre con un comienzo y un fin, como para cualquier ser vivo, y, por otro lado, la vida que forma la singularidad humana porque se compone de hechos narrables. Podríamos hablar entonces de vida biológica y de vida biográfica. La esperanza de vida mide la extensión de la primera. La historia de vida relata la riqueza de la segunda. La desigualdad de las vidas solo puede percibirse en el reconocimiento de las dos. Debe diferenciarlas y conectarlas a la vez. Diferenciarlas, porque la paradoja de las mujeres francesas deja en evidencia que una vida larga no alcanza para garantizar una vida buena. Conectarlas, porque la experiencia de los hombres afroamericanos recuerda que una vida desvalorizada termina por producir una vida arruinada. [...] Así se plantea también la cuestión de los refugiados y de los migrantes.
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There is, on the one hand, life that flows from a beginning to an end, and, on the other hand, life that constitutes human singularity because it can be recounted. We may term them "biological life" and "biographical life". Life expectancy measures the length of the former; a life story relates the richness of the latter. Only by acknowledging both can the inequality of lives be comprehended. They should be conceived of as being both distinct and connected: distinct, because the paradox of French women shows that a long life is no guarantee of a good life; connected, because the experience of African-American men stands as a reminder that a devalued life is a damaged life. This also raises the question of refugees and migrants.