Imaginez qu'une foule d'esprits malins vous cerne. Vous ne les voyez pas, ou à peine, mais vous les entendez débattre entre eux des pièges qu'ils s'apprêtent à vous tendre. Ils s'emparent de votre corps, vous font parler, tousser, grogner, vous gratter malgré vous, déplacent à leur guise votre main ou votre pied et font même se mouvoir les cadavres. Telle fut l'expérience de l'abbé Richalm et d'une poignée de moines cisterciens de Schntal, en Allemagne du Sud, vers l'an 1200. La récente découverte de leur prodigieux dialogue sur les démons, le Livre des révélations, jette une lumière totalement nouvelle sur les croyances et plus largement sur la culture et la société de l'époque médiévale, tout en nous faisant partager l'angoissant confinement de ces hommes et des démons dans l'espace exigu d'un monastère. Le cloître des ombres rend compte de ce cas stupéfiant, en combinant les approches de la microhistoire et de l'anthropologie sociale et culturelle, et, en offrant pour la première fois, une traduction dans une langue moderne d'un témoignage sans équivalent sur la puissance des démons.
Les rythmes entraînent dans leur mouvement la vie tout entière des individus et des sociétés : les comportements quotidiens et les expériences esthétiques, les déplacements dans l'espace aussi bien que l'ordre du temps. Il n'y a pas de vie sans rythme, c'est-à-dire - comme dans un air de jazz ou une toile abstraite de Mondrian - sans une mise en ordre variable de faits qui se répètent en combinant indéfiniment périodicité et rupture.
Philosophes, sociologues, anthropologues, musicologues s'interrogent parmi d'autres depuis deux siècles sur les rythmes sociaux, dont Marcel Mauss disait qu'ils commandent les représentations du temps. Pourtant, il n'existe pas à ce jour une histoire des rythmes qui confronte nos conceptions et expériences du rythme à celles du passé. Or, le contraste est fort entre notre monde moderne, où les rythmes sont partout, mais sont observés dans des champs séparés (rythmes scolaires, arythmie cardiaque, tempo musical, croissance économique en dents de scie...) et la civilisation holiste de l'Europe médiévale : ici, la notion de rythme, héritée de l'Antiquité gréco-romaine, paraît ne concerner que la musique, la poésie et la danse, mais elle entre en fait en résonance avec la totalité de la Création, que Dieu aurait façonnée en six jours.
C'est à ce rythme fondateur que le présent livre emprunte sa propre scansion, en explorant successivement les significations du rhythmus médiéval, les rythmes du corps et du monde, ceux du temps, de l'espace et du récit, avant de s'interroger sur la fonction des rythmes dans le changement social et la marche de l'histoire.
Grand prix des rendez-vous de l'Histoire 2017
La croyance aux revenants semble de tous les temps ; elle a pourtant aussi son histoire. Que signifiait au Moyen Âge cette "croyance" et comment la saisir ?
Les dix siècles qui vont de l'Antiquité tardive à la veille de la Renaissance ont vu se succéder et se combiner les vieilles croyances païennes et les rituels lentement christianisés. Ils sont contenus dans la notion de memoria, de "mémoire des morts", faite de liturgie, de larmes et de prières ; une mémoire en réalité destinée à aider la séparation des vivants et du défunt, à régler le fonctionnement social de l'oubli.
Les revenants médiévaux, c'étaient les rares morts qui, obstinément, pendant une durée assez brève, tenaient en échec le fonctionnement réglé de la memoria chrétienne, faisant obstacle au déroulement nécessaire du "travail du deuil". Revenants pitoyables ou terrifiants, le plus souvent solitaires, surgissant de leur tombe pour hanter la conscience des proches et des parents, coupable ou douloureuse.
On saisit immédiatement l'ampleur des problèmes que fait surgir l'analyse rigoureuse de cette moisson de textes et d'images qui racontent l'apparition des morts, et où le spirituel se mêle au corporel, l'individuel au collectif, la personne à la parenté, le jour à la nuit, le merveilleux à l'ordre social. Ce livre ouvre à l'histoire sociale un secteur nouveau : la science des rêves.
Il est devenu banal de dire que nous sommes entrés dans la civilisation de l'image. Les images animées, numériques, virtuelles façonnent notre monde avec une force sans précédent. Mais elles s'enracinent aussi dans une longue histoire, où la chrétienté médiévale a joué un rôle décisif : en osant - contre le vieil interdit biblique - faire et adorer les images, et même donner figure humaine au Dieu incarné, le Moyen Âge a ouvert d'immenses possibilités à la création plastique et à l'imaginaire individuel et social.
Ce livre s'attache à saisir ensemble, dans leur développement historique, les conceptions de l'imago médiévale et les pratiques rituelles (religieuses ou politiques) et fantasmatiques dont les images furent l'objet depuis le Haut Moyen Âge jusqu'à la Renaissance et la Réforme. Aux images matérielles, en deux ou trois dimensions, l'auteur associe les images visionnaires et oniriques qui permettaient de les légitimer et de se les approprier, comme s'il s'agissait de personnes vivantes, douées de corps et de sang, de parole et de mouvement...
L'image est l'une des manières par lesquelles une société se re-présente le monde, c'est-à-dire se le rend à nouveau présent pour le penser et agir sur lui.
Qui veut comprendre le Moyen Âge doit le tenir à distance : poser sur lui le regard de l'anthropologue étudiant une société étrangère à sa propre culture et à ses habitudes de pensée. C'est la première ambition de ce livre : mettre en garde contre l'usage de catégories - la 'religion' par exemple, ou l''individu', - dont il convient de saisir la relativité historique. Voilà qui peut sembler paradoxal, mais il n'y a pas, au Moyen Âge, de 'religion', au sens où nous l'entendons aujourd'hui. Toute une 'culture', en revanche, complexe, foisonnante, originale, se déploie selon les différents pôles constitutifs de cette société : les clercs et les laïcs, la cathédrale et le château, la communauté paysanne et la ville. S'en dégagent des conceptions irréductibles aux nôtres, du corps et de la personne, de la croyance et des rêves, des rites et du temps, à l'articulation de l'homme et du divin (ou du démoniaque), de l'ici-bas et de l'au-delà, des images et de l'invisible, de la memoria et des futura.
Ce livre retrace le parcours sinueux d'une recherche de plus de vingt ans à travers les textes et les images issues de la culture médiévale. Il tente de répondre aux questions que pose la construction d'une anthropologie historique du Moyen Âge : qu'est-ce qu'une 'personne' dans la société médiévale ? Qu'en est-il de la notion du 'sacré' ? L'idée d''avenir' est-elle compatible avec la conception eschatologique du temps chrétien ?
Vers le milieu du XIIe siècle, un juif originaire de Cologne, converti au christianisme et devenu prêtre à Cappenberg, en Westphalie, écrit en latin, sous le nom d'"Hermann l'ancien juif", le récit de sa conversion (Opusculum de conversione sua). Cette "autobiographie" est l'une des toutes premières en Occident depuis les célèbres Confessions de saint Augustin. Ce texte singulier divise les historiens, les uns y voyant le "récit vrai" d'un authentique juif converti, les autres une pure "fiction" forgée par des clercs chrétiens. Jean-Claude Schmitt montre que la question est mal posée: ce récit à la première personne est à la fois "vrai" et "fictif", et il est vain de lui chercher un auteur, fût-ce un juif converti. Hermann a bien pu exister et contribuer à la mise par écrit de sa propre histoire, mais l'Opusculum n'en est pas moins une oeuvre collective, peut-être destinée à illustrer le rayonnement de l'abbaye prémontrée de Cappenberg.
Plutôt que de se battre sur une question d'attribution, mieux vaut déplacer les questions et interroger le contenu du texte pour en comprendre les significations dans la société et la culture de l'époque. Qu'en est-il alors de l'autobiographie et de la subjectivité, de la fonction des rêves dans les cultures juive et chrétienne, de la légitimité des images religieuses dans un cadre monothéiste, de la conversion individuelle et collective, du nom et de l'identité? Simultanément, l'auteur saisit l'occasion des débats suscités par l'Opusculum pour s'interroger plus fondamentalement sur les manières dont les historiens pensent et écrivent l'histoire.
Ainsi, non seulement l'étude de cas est-elle guidée par une ample problématique, mais elle se double tout au long de la démonstration d'une mise en question critique du travail de l'historien, faisant de ce livre une leçon de méthode.
Charlemagne se tord la barbe et pleure ; devant Guillaume le Conquérant, Harold prête serment les mains posées sur des reliques ; les bras tendus, le prêtre élève l'hostie que les fidèles, à genoux et les mains jointes, fixent du regard ; tous font des signes de croix. Qu'ils nous surprennent ou nous paraissent aujourd'hui encore familiers, tous ces gestes sont liés à une culture et à son histoire. Car il n'existe pas de gestes 'naturels', mais des usages sociaux du corps, propres à chaque civilisation et qui changent au cours du temps.
Ce livre explore l'histoire des gestes en Occident, depuis l'Antiquité tardive jusqu'au Moyen Âge central. D'entrée de jeu, il souligne un problème crucial : l'historien, à l'inverse de l'ethnologue ou du sociologue, n'atteint pas directement les gestes du passé, mais toujours dans des écrits ou des images, des représentations des gestes qui en sont aussi des interprétations données par la culture du temps. Ce qui déplace et enrichit le questionnaire de l'historien : qu'est-ce que 'faire un geste' dans la société chrétienne du Moyen Âge ? Comment juge-t-on à cette époque le corps, son mouvement et ses attitudes ? Existe-t-il alors une ou des théories du geste ?
Jacques Le Goff (1924-2014) a été l'un des très grands historiens de son temps. Il a été l'auteur d'une oeuvre immense, consacrée pour l'essentiel à l'histoire du Moyen Âge, qu'il a renouvelée en profondeur. Cet ouvrage en explore les ambitions, les objets et les démarches. Il réunit les contributions présentées à l'occasion d'une journée d'hommage organisée en janvier 2015 par l'École des hautes études en sciences sociales et par la Bibliothèque nationale de France. Aux très nombreux lecteurs de Jacques Le Goff, mais aussi à ses collègues et à leurs étudiants, il permettra de situer l'oeuvre dans le « moment » intellectuel et scientifique des années 1960-1990, de prendre la mesure de son rayonnement international et de rappeler la présence de l'homme public : un homme toujours soucieux de faire connaître les résultats de la recherche à un public élargi, passionné par les médias, mais aussi un citoyen engagé pour les libertés et un défenseur passionné de l'Europe en construction.
"Nous n'avons pas de plan à cinq ans, ni à deux ans, pas plus à un an. Nous avons une mission et une stratégie. La mission est d'organiser l'information du monde. La stratégie est de le faire à travers l'innovation."
Eric Schmidt - P-DG de Google
"L'instinct, le courage et la créativité de l'entrepreneur ne sont pas quantifiables dans un business plan. Imagination, action, incarnation, voilà les variables fondamentales qu'aucun curseur ne peut modifier."
Jacques-Antoine Granjon - P-DG et fondateur de vente-privee.com
Avec un million d'entrepreneurs de plus, en moins de trois ans, la France a rattrapé une densité entrepreneuriale présente à l'international. Pourtant, les créateurs d'entreprise ont de grandes réticences à se lancer, tant le processus leur paraît complexe. D'ailleurs, les plus grands succès viennent des entrepreneurs qui maîtrisent avec brio la conception d'opportunité et qui n'ont pas forcément bâti un business plan.
Dans cet ouvrage, un ensemble d'outils sont mis à la disposition du créateur pour l'aider dans sa démarche et le conduire vers le succès. Les approches suggérées font appel autant à ses capacités créatives qu'analytiques pour transformer la compréhension des besoins du marché en opportunités d'affaires. Dans cette perspective, l'approche SynOpp suggère une démarche innovante pour soutenir la création d'opportunité du futur entrepreneur, tandis que l'approche IDéO offre des paramètres structurants pour l'aider à définir des scénarios pour passer à l'action. L'ouvrage propose une vision globale des actions à mener. Il a été conçu comme un fil conducteur qui offre au créateur des repères pour ses prises de décision. Il favorise l'organisation cohérente de ses activités, en fonction de l'avenir qu'il souhaite construire.
Ont collaboré à cet ouvrage : Franck Barès (HEC Montréal), Jean-Pierre Béchard (HEC Montréal), Cândido Borges (Universidade Federale de Goias), Denis Grégoire (Syracuse University), Julien Husson (université de Lorraine), Edmilson Lima (Universidade Nove de Julho, São Paulo), Marie-Ange Masson (HEC Montréal), Sybil Persson (ICN Business School, Nancy), Patrick Valéau (université de la Réunion).
Ce livre a été retenu dans la liste des ouvrages en sciences de gestion labellisés en 2014 par le Collège de Labellisation de la FNEGE.
Qui la jolie princesse épousera-t-elle ?
Un prince grossier ou Jean le poète ?
Notre choix est fait, mais ce ne sera pas facile...
Un aller-retour édifiant (et amusant) entre le Moyen Âge et notre époque, une belle complicité entre l'auteur et le lecteur, du suspense et de nombreux rebondissements, voilà un conte décalé qui devrait plaire aux préados comme aux plus grands !
Dans la maison de retraite « Les tournesols », les résidents se souviennent avec nostalgie du bon vieux temps où ils étaient actifs et responsables. Ils ont tous leurs fortes personnalités, leurs rêves, leurs espoirs, leurs manies souvent surprenantes.
Ce livre est un peu de leur histoire, une suite de scènes pittoresques tantôt graves, tantôt amusantes, tantôt tristes, tantôt violentes, piochées dans leur quotidien selon un point de vue original : celui de l'aide-soignante qui témoigne de son travail au sein de l'institution. Si son objectif est de positiver, de montrer qu'il y a encore « une vie après la vie », elle ne cache pas les difficultés de son métier souvent épuisant qui demande beaucoup d'abnégation.
Professeur de français retraité, Claude Schmitt est l'auteur de nombreux polars régionaux, d'un conte décalé pour préados et, avec sa compagne Cathy, de témoignages sur la vie quotidienne en EHPAD.
Avec ce « P'tit tour en Bretagne », il nous propose une oeuvre plus personnelle, le compte rendu d'un « Voyage extraordinaire » qu'il a effectué en 1969 avec son ami d'enfance, Denys : 2245 kilomètres à vélo, une traversée de la France aller et retour d'est en ouest.
Dans un style direct spontané, il nous plonge avec nostalgie dans son vécu en relatant de nombreuses péripéties palpitantes, amusantes, surprenantes et parfois même plus graves.
C'était dans un autre monde où tout paraissait possible, évident, plus simple, plus sûr.
Prenez place sur son porte-bagages et en route pour l'aventure !
Parcourant une longue série de textes de nature autobiographique rédigés ou dictés par des souverains depuis l'Antiquité jusqu'aux xviie-xviiie siècles, les auteurs de ce livre s'interrogent sur le statut, l'autorité et les enjeux d'une parole par laquelle certains souverains - pas tous - ont affirmé simultanément leur maîtrise de soi et leur domination sur un territoire et des sujets. Cette interrogation concerne les Resgestae d'Auguste ou les écrits de Julien l'Apostat autant que la Saga de Sverrir, les livres de Jacques Ier d'Aragon et de Pierre le Cérémonieux ou encore les témoignages de Frédéric III, Maximilien Ier, du pape Pie II Piccolomini et plus tard de Catherine II de Russie. D'autres documents de cette nature, produits dans des contextes culturels, religieux et géographiques différents, sont également convoqués comme les mémoires d'Abdallah de Grenade au xie siècle, les écrits de Jean VI Cantacuzène (1347-1354) ou du grand Moghol Babur (mort en 1530). Un faisceau de questions soutient ce parcours : elles portent sur les titres donnés à ces ouvrages singuliers, sur le ou les auteurs, les formes d'écriture, les manuscrits et leur diffusion, les stratégies discursives, les relations entre autobiographie et mémoires, le choix de la langue savante ou vernaculaire, les espaces et les temps de la narration, les destinataires de l'oeuvre. À chaque fois, un triple processus de construction est mis en scène, qui concerne fondamentalement les particularités du texte autobiographique, les formes de subjectivité et les régimes de souveraineté politique. Ce volume rassemble les actes d'un colloque international organisé par Pierre Monnet et Jean-Claude Schmitt, tous deux directeurs d'études à l'École des hautes études en sciences sociales, les 14 et 15 mars 2008 à la fondation Singer-Polignac et à l'École normale supérieure de la rue d'Ulm. Il est issu d'un programme de recherche du groupe d'Anthropologie historique de l'Occident médiéval (Centre de recherches historiques de l'EHESS et du CNRS), financé par l'Agence nationale de la recherche, sur les écritures de soi et la souveraineté politique. Cette recherche collective a permis aussi la publication, sur le même thème, de Vie de Charles IV de Luxembourg.