Tributaire d'une vision racialiste, le terme « antisémitisme » prête à confusion et ne suffit pas à rendre compte de toutes les haines antijuives. Le phénomène est ancien et protéiforme, de la judéophobie antique, qui s'oppose à la religion juive, jusqu'à l'antisionisme radical, en passant par l'antijudaïsme chrétien, la judéophobie antireligieuse des Lumières, celle, anticapitaliste et révolutionnaire, du socialisme des origines, et l'antisémitisme à proprement parler, racial et nationaliste. Il restait à en dresser la typologie et la généalogie. C'est ce à quoi s'applique Pierre-André Taguieff, qui fait ici le tour de toutes les judéophobies pour montrer en quoi elles se fondent sur des rationalisations a posteriori destinées à légitimer des aversions, des peurs et des passions injustifiables.
Par « théories du complot », on désigne des explications douteuses ou fausses qui s'opposent aux thèses « officielles » et mettent en scène un ou plusieurs groupes agissant en secret pour réaliser un projet de domination ou d'exploitation. Les conspirateurs fantasmés sont supposés être à l'origine de tous nos maux. Le moteur de ces raisonnements ? L'insatisfaction cognitive face à des événements traumatisants. C'est de cette frustration porteuse de suspicion que dérive le discours complotiste contemporain, qui met l'accent sur le doute. Mais les réponses données, factuellement fausses, constituent de nouveaux dogmes véhiculés par les réseaux sociaux. Pierre-André Taguieff fait l'hypothèse que le complotisme répond à une demande de sens et de cohérence : l'ennemi invisible et diabolique explique tous les malheurs des hommes. En cela, les récits complotistes réenchantent le monde, fût-ce pour le peupler de démons. Mais ils alimentent en même temps des accusations mensongères. Comment dissiper de telles illusions ?
Objet de fantasmes et de répulsion, l'eugénisme est associé aussi bien à des projets techno-scientifiques qu'à des idéologies ou des doctrines (darwinisme social, racisme), des utopies futuristes, des mesures relatives à la procréation ou encore à des politiques démographiques. A minima, il est possible de le définir comme la volonté de modifier le patrimoine génétique de l'humanité en vue de son amélioration. Mais adhérer à une telle perspective, n'est-ce pas présupposer l'existence d'une inégalité génétiquement déterminée entre humains ou vouloir créer des élites héréditaires ? Jusqu'où conduit cette entreprise, dont les objectifs oscillent entre normalisation et fabrication du surhumain ? Pierre-André Taguieff décrypte un projet qui connaît un regain d'intérêt avec le transhumanisme et les techniques de procréation médicalement assistées, et qui en dit long sur la propension des hommes à se révolter contre la nature ou à se prendre pour des dieux.