Faits divers & vies déviantes
XIXe-XXIe siècle
Un " chourinage " dans la Seine en 1890, l'empoisonnement d'une archiduchesse d'Autriche par ses bas noirs en 1894, l'inquiétude autour d'une maison hantée à Yzeures-sur-Creuse en 1897, la mystérieuse disparition d'un étudiant en 1906, l'explosion de l'outil piégé d'un marbrier en 1914, un meurtre de chien en 2015 : voilà quelques-unes des affaires sélectionnées ici par Roy Pinker dans la presse du XIXe au XXIe siècle. Ces faits divers, incidents, accidents, canulars, délits, voire crimes, mettent en scène une incongruité du quotidien, un déraillement de la logique, une petite vie obscure ou infâme soudainement rendue visible par un journal.
Ces petits faits curieux, loin d'être insignifiants, apparaissent alors comme les symptômes des inquiétudes ou des enthousiasmes d'une société ; ils forment les éléments significatifs d'un vaste imaginaire social et médiatique, qui passionnait l'historien du crime, Dominique Kalifa, auquel ce livre est dédié, abordant tous ses sujets de prédilection : le fait divers, le sensationnalisme, les marginaux, la Belle Époque, le bagne, les bas-fonds, l'érotisme.
Préface d'Alain Corbin
Vidéo d'un chat qui saute en voyant un concombre, blague sur l'actualité, dénonciation d'une injustice : nous avons tous conscience de vivre dans une culture de la viralité, où le succès se mesure à la vitesse de la propagation. Et nous pensons tous que c'est une marque de notre modernité, que ce sont les réseaux sociaux qui ont transformé les modalités de diffusion des idées. Les auteurs, tous spécialistes de l'histoire de la presse, nous prouvent ici qu'il n'en est rien : au XIXe siècle, le " copier-coller " régnait déjà dans la presse ; une histoire bien troussée, même fausse, pouvait être reproduite à des centaines d'occasions à travers les continents, comme une bonne histoire sur Facebook ; le bon mot d'un écrivain réapparaissait un peu partout, comme un tweet populaire ; légendes urbaines, fake news, rumeurs, circulaient de journaux en journaux ; des réclames publicitaires mystérieuses s'étalaient sur les murs, pour faire le buzz comme on dit aujourd'hui.
Avec un plaisir contagieux et en 15 courts chapitres partant d'un phénomène contemporain pour en faire l'archéologie, ce livre démonte les mécanismes de la viralité médiatique, pour montrer que ce sont des phénomènes profondément ancrés dans la culture de la presse, dès sa naissance.
Ce que la presse a appelé "l'histoire la plus intéressante de la décennie sur le plan humain" consistait en une personnalité mondialement connue, un kidnapping d'enfant en bas âge, un procès filmé en direct (une première), un assassin condamné à mort sans jamais avoir avoué son crime... mais surtout, en un véritable déluge d'informations non vérifiées, de rumeurs, une foule de correspondants et d'envoyés si spéciaux qu'ils n'existaient pas nécessairement.
En mars 1932, le fils du célèbre aviateur Charles Lindbergh est enlevé puis assassiné. Quatre ans plus tard, à l'issue d'un procès contestable, Bruno Hauptmann est exécuté. Ce livre ne s'attarde pas sur les détails de ce qui est vite devenu "l'affaire du bébé Lindbergh" : il l'aborde comme un moment charnière de l'histoire des médias, où s'installent des méthodes sensationnalistes omniprésentes aujourd'hui. Roy Pinker est le nom de l'envoyé spécial que l'hebdomadaire Detective avait inventé dans les années 1930 pour couvrir l'affaire Lindbergh. il signe le travail d'un collectif d'universitaires rédigé par Paul Aron et Yoan Vérilhac, qui enseignent la littérature respectivement à Bruxelles et à Nîmes.