Victor Bérard (1864-1931), illustre savant, helléniste en barbe à pointe et cheveux au vent, consacra une bonne partie de son existence à l'Odyssée, en offrit une traduction inoxydable et sillonna la Méditerranée sur les traces d'Ulysse.
Il s'est ainsi fabriqué d'un tome l'autre une oeuvre foisonnante, son odyssée propre. De même que Victor Bérard a réinventé l'Odyssée, Sophie Rabau invente ici Victor Bérard en Victor B., son double créatif, figure de l'imagination en train de pratiquer l'enchantement du monde.
Dans cet essai romanesque plein d'une joie - d'une gaieté - dangereusement contagieuse et d'une érudition sans faille et sans complexe, elle nous pousse ainsi d'une main assurée au bord des abîmes de l'interprétation littéraire et offre de nouvelles couleurs à l'un des plus beaux poèmes qui soit.
Rien, dans la nouvelle de Prosper Mérimée, pas davantage que dans l'opéra de Bizet, n'oblige objectivement Carmen à être tuée. Relisant Carmen tout en le réécrivant, Sophie Rabau sauve la célèbre gitane du poignard fatal et l'emmène semer la panique dans toute la littérature. Et dynamite façon puzzle le mythe tragique de la femme fatale.
Carmen, pour changer est un texte politique, joyeux et féministe, une invitation à lire les livres activement. Pour changer.
Sophie Rabau, professeur de littérature à l'université de Paris III-Sorbonne nouvelle. Elle a déjà commis chez Anacharsis B comme Homère. L'invention de Victor B (2016), à propos du traducteur/inventeur de l'Odyssée Victor Bérard, ainsi que L'Art d'assaisonner les textes (2020).