Grasset
-
Prix Médicis 1991. Le monde d'aujourd'hui, avec ses fractures, ses drames politiques, ses éruptions de liberté venues de l'Est. L'histoire de deux individus, Simon et Marianne, qui essaient d'inventer une histoire d'amour. Simon est un drôle de type : il a publié deux romans sous pseudonyme et il s'apprête à en publier un troisième, mais écrit par un autre. Simon est un rêveur et d'étranges blessures habitent sa mémoire : ainsi, on le devine obsédé par un fils qu'il aurait eu, autrefois, et qu'il n'a jamais vu... Avec Marianne, il voudra retrouver le goût d'une passion qui ne s'use pas. D'autres personnages étranges : l'écrivain Kaspar George Becker (K.G.B.) qui écrit un roman dans lequel défilent toutes les convulsions de l'ancienne Europe ; une concierge excentrique qui s'appelle Madame Dior ; Rosa, et Marcella, et Lucien, et Alice, et tant d'autres qui se déplacent dans ce livre comme autant de somnambules. Peut-être ne sont-ils pas seulement les personnages du roman que l'on est en train de lire mais aussi ceux du roman que Simon, le narrateur, est en train d'écrire... C'est dire que ce livre voudrait être une fable sur l'époque mais aussi sur la création littéraire.
-
Pour la première fois, Yves Simon se raconte dans un livre. C'est l'itinéraire d'un artiste atypique, reconnu à la fois comme romancier et auteur-compositeur de chansons.
« De quel empilement de mots, de lieux, d'objets, de rencontres sommes-nous les représentants ? Qui et quoi nous a faits tels que nous sommes, nous et nul autre ? »
Dans cet autoportrait, Yves Simon célèbre les musiciens, les écrivains, les poètes, les villes et les pays, les films, les objets qu'il a aimés, les personnes qu'il a croisées et qui ont influencé sa vie comme son oeuvre... Exemplaires ou anodins, il dresse l'inventaire de ses anges de passages, et leur rend hommage.
On rencontre ainsi, au fil des pages : François Mitterrand, un jour de confidences ; Simone Signoret, au soir de la vie ; Chris Marker, dans un bar de Tokyo ; Bowie, qui serre Higelin et Yves Simon contre son coeur, dans un petit matin blême ; Serge Gainsbourg, dans une ville de province... Mieux que personne, le romancier évoque ces figures de l'ombre, de la marge, tous les anges de lumière...
Parmi ces figures, il y a aussi des inconnus sublimes, la jeune Lesley, premier amour de quinze ans découvert à l'ombre de Proust ; un père cheminot avec qui il est difficile de parler, sauf au dernier jour... La manufacture des rêves, c'est l'âme de l'artiste qui prend et qui donne.
Dans des pages généreuses, il partage avec nous, émerveillé, le silence des grands déserts américains, le grésillement d'un ordinateur portable, compagnon des nuits d'écriture, la solitude du chanteur de scène... -
Jean-Yves Jouannais est connu pour le cycle de conférences intitulé l'Encyclopédie des guerres qu'il a initié voici dix ans au Centre Pompidou.
Tous les livres qu'il a publiés depuis, entre roman et essai, tentent une nouvelle approche de ce même sujet de la guerre. C'est le cas également de ce dernier ouvrage. MOAB (Mother of all the battles) est un poème épique, une bataille imaginaire.
Son texte est le fruit d'une compilation d'environ un millier de citations extraits de livres de guerres. Ces ouvrages - recueil de poésie, romans, livres techniques, témoignages, lettres de soldats, livres d'histoire - traitent de tous les aspects de toutes les guerres, de l'Antiquité à nos jours. Il en résulte un texte aux styles variés, à la grammaire irrégulière, aux temps multiples, qui dit le caractère éternel de la guerre.
MOAB est donc le récit d'une seule et même bataille racontée avec les bribes de toutes les batailles ayant eu lieu depuis les débuts de l'humanité.
Pour sa première mise en scène, en septembre 2017, au musée des Invalides, une sélection de dix chants de MOAB avait été faite afin d'être interprétés par plusieurs lecteurs, chanteurs, comédiens et musiciens. -
Sur mon courrier je t'emmène - sur la mer à perdre haleine - sur ma bouche je t'emmènerai... L'air et les paroles sont sur toutes les lèvres. Pour Yves Simon, respirer, c'est chanter, et chanter, c'est partir un peu. Mais l'écriture aussi lui est un voyage, à la recherche " des milliardaires d'histoires qui se promènent dans le monde ". Transit-Express en recueille quelques-unes, au passage, dans le train-fantôme de l'imagination.
Il suffit d'un rien, d'une rencontre. Il suffit qu'un garçon comme tous les autres - plus perdu que d'autres, peut-être - échoue dans une salle d'attente un soir de vague-à-l'âme et en vienne à échanger avec un inconnu la clé de sa chambre contre un billet de train. Soudain libéré de ce qui l'attache au quotidien, voici Marco embarqué dans la plus étrange des aventures, en compagnie de nombreux autres " voyageurs " captivants et singuliers. Tandis que le train traverse des pays de neige et des villes lointaines, des régions dévastées, des vallons riants ou des paysages de ruine et de guerre, ce petit groupe d'errants roule vers son destin. Tragique pour Douchan, le réfugié toujours en fuite ou pour la petite Natché, qu'entraînent les fantasmes d'un amour impossible, nostalgique pour ceux qui vont le dos à la marche du train, tournés vers leurs souvenirs, riche de songes pour ceux qui ont beaucoup aimé, telle Roda, qui en sait long sur la passion, le sort se faufile, d'un wagon à l'autre. Et sur ce monde ferroviaire, insolite, varié, pittoresque, règne Melchior, le contrôleur, qui note les départs, les arrivants, comptable méticuleux de cette randonnée sans but ni fin, à moins qu'un jour quelqu'un ne tire le signal d'alarme...
Belle fable aux prolongements secrets, belle idée surtout, Transit-Express, on l'aura deviné, est une allégorie où chacun aura le sentiment de reconnaître un peu son propre voyage à travers le temps. Notre temps. Nul ne sait à quelle gare il descendra, ni pourquoi il est monté à telle station plutôt qu'une autre. On est sur les rails, et voilà tout, dans la course d'un train fou. Qui pourrait nous en dire davantage sur sa destination ?
Plus grave, plus motivée, on aimera dans ce troisième roman d'Yves Simon toute la mélancolie profonde de son talent, fait d'instants saisis, de vérités captées, d'une sensibilité juste et sans apprêts. Pour lui, et par lui, la " litanie de la vie moderne " envo-te et s'impose, dans la poésie des mots la vigueur évidente des images. Et comme dans ses chansons, il s'agit encore une fois d'une ballade, où il se fait le complice, le tendre, mais le lucide témoin d'une génération qui veut toujours rêver ailleurs son existence, en attendant un âge qui tarde. -
Dans la lignée de {Jours ordinaires}, voici un recueil de textes brefs pour parler d'aujourd'hui. Traduit par Simon, le banal ou l'ordinaire des jours prend soudain l'allure de l'exceptionnel. L'époque, notre époque, apparaît autrement, sous d'autres traits, avec d'autres nuances. Ici, en fait, l'artiste renoue avec sa fonction de traducteur : il prélève un élément simple du monde présent, que nous avons pris l'habitude de recevoir sous la forme d'un flot ininterrompu d'images, l'arrête, le met en mots et nous demande de le regarder. Donner à voir l'anodin, l'invisible, montrer le monde qui change de peau, exposer les fractures d'une histoire en train de se faire, ou transmettre une confidence douce-amère tirée de sa propre vie, un épisode de son existence, une réflexion : telle est la nature de {Sorties de nuit}.
-
Les héros de Yves Simon sont, comme l'auteur qui les conçoit, des êtres écorchés, mélancoliques, jetés dans une modernité qui les déconcerte et où leur romantisme quasi-ontologique ne trouve pas toujours sa vraie place. Ce sont des « décalés », des nomades de la vie, des voyageurs sans but. Ici, les deux héros de ce nouveau roman sont des Novices.
Leos et Julia, deux jeunes gens d'aujourd'hui, tâtonnent dans le maquis des sentiments. Deux êtres qui se cherchent, se trouvent, se perdent, se retrouvent. Education sentimentale. Ultra-moderne solitude ? C'est de cela qu'il est ici question.
L'intrigue ? Un fil de soie tendu entre la jeunesse et la fin de la jeunesse. Un lent ballet d'émotions. Où Leos et Julia tentent de s'aimer puis de s'oublier - avant de s'aviser qu'ils ont besoin l'un de l'autre. Au passage, ils auront fait l'expérience de tout ce qui fait le charme des univers « simoniens » : la nuance amoureuse, le dépit, l'impatience, l'espérance.
Un roman sur le désarroi de « novices » un peu perdus dans les jungles d'asphalte.
Un éloge de la passion et de ses tumultes dans un monde qui n'aime plus les tulmutes de la passion. -
Dans une Provence que le Père confond avec l'Amérique au point d'appeler sa fille Virginie, dans une époque qui est la nôtre mais qu'il refuse, au point d'élever ses enfants dans le culte des Indiens d'il y a plus d'un siècle, un étrange drame se joue : le Père campagnard, fidèle à son bogey attelé de la jument Indiana, en proie à l'obsession d'arrêter le temps, de figer le temps dans une éternité exotique, hostile non seulement aux voitures, au progrès, mais à la vie dans son dynamisme même ; le Fils enfin, cadet de Virginie, déchiré entre une fidélité impossible au Père et une attirance impudique vers sa soeur, ne se résolvant à vivre ni dans un attachement morbide au pssé ni dans un lien incestueux avec le présent.
Qu'arrivera-t-il ? Le Père terrien réussira-t-il à retenir son fils dans les mirages du Paradis terrestre ? Virginie réussira-t-elle à faire de son frère un adulte ? Yves Berger évoque ici, dans un langage d'une poésie entièrement nouvelle, le passage déchirant de l'enfance à l'âge d'homme. Mais le thème, déjà si riche de résonances, se développe sur d'autres plans : l'opposition de la campagne et de la ville, de la terre-mère et de la femme-soeur, du monde clos et du monde ouvert, de la stagnation et du mouvement. Où est la « vraie vie » ? Dans une participation active, mais impure et tourmentée, à l'existence ? Ou dans la contemplation du temps perdu ? Yves Berger se garde de répondre : c'est au lecteur d'interroger longuement le secret de ces trois êtres, qui s'aiment, se fuient et se retrouvent au terme de leur aventure intérieure.
Publié en 1962, prix Fémina, Le Sud a eu un retentissement considérable. Ce livre plein de l'amour de la vieille Amérique, Yves Berger l'écrivit alors qu'il n'avait pas encore fait son premier voyage aux Etats-Unis, qui devait plus tard lui inspirer le célèbre Fou d'Amérique. -
J'ai écrit ces textes au fil du temps, des heures. Un journal ? Peut-être. Mais rien n'est daté. Plutôt une liste des choses qui m'ont fait battre le coeur, comme l'écriture autrefois Sei Shônagon, cette courtisane raffinée d'une cour japonaise.
Notations express de l'air du temps, le temps des années 80 avec quelques-uns des personnages - illustres ou inconnus - qui les traversent : rencontre inattendue avec Jean-Luc Godard, message de Win Wenders griffonné depuis un bar de Tokyo, François Mitterand qui rit dans un petit salon de l'Elysée. Les petites amoureuses sont là, elles aussi, Paris et tous ces passants qui se demandent comme moi, qui se souviendra de ces détails, de ces gestes dérisoires qui habillent nos vies, de ces pensées fugaces pour un visage qui bouleverse : ces tendres stocks d'images et de sensations que l'histoire oublie, mais qui hantent nos séjours secrets. Y.S. -
Ces onze nouvelles d'Yves Simon ont en commun la solitude et le besoin d'aimer. Voici une femme qui avoue, à l'ombre d'un confessionnal, son amour pour le confident de celui qui se croyait follement aimé d'elle... et qui l'écoute. Voici un vagabond suivi dans son errance, jusqu'au terme tragique. Voici un vieux cinéaste, au charme éraillé, qui s'épuise à filmer un couple déchiré. Voici - serait-ce un double - un personnage d'écrivain intranquille toujours à la recherche d'un instant de bonheur. Voici Irène qui offre ses maladresses touchantes et le désir de son corps, à l'homme qui sait bien qu'elle n'est pas tout à fait son genre. Scènes vues, vécues ou imaginées, polaroïds du désir, et malgré la difficulté de bien des personnages à traverser la vie, cette demande qui monte : encore un instant de bonheur.
-
Le roman du Vendée-Globe
Christophe Agnus, Pierre-Yves Lautrou
- Grasset
- Essai
- 13 Octobre 2004
- 9782246675990
Vendée Globe - Dans les coulisses de la légende est le récit documenté d'une saga extraordinaire : celle d'une course à la voile autour du monde (en solitaire et sans assistance) hors norme, le Vendée Globe, dont le départ de la 5e édition est prévu le dimanche 7 novembre 2004 aux Sables d'Olonne. Le destin de « L'Everest de la voile », comme on surnomme cette course, est exceptionnel. Depuis sa création dans un bar du Cap, jusqu'au scandale qui a éclaboussé son organisateur, avant qu'elle ne soit rachetée par Philippe de Villiers en 2003.
Le Vendée Globe, c'est le sauvetage de Philippe Poupon par Loïck Peyron ; Bertrand de Broc qui se recoud la langue lui-même ; le naufrage de Thierry Dubois et Tony Bullimore dans le Grand Sud ; Raphaël Dinelli sauvé d'une mort certaine par Pete Goss ; la disparition de Gerry Roufs ; le sacre d'Ellen MacArthur.
Autant de moments légendaires que ce livre écrit par deux passionnés éclaire d'un nouveau jour, grâce à une enquête précise, des archives jamais exploitées et une centaine d'entretiens. Quel rôle jouent véritablement les sponsors ? Comment les coureurs acceptent de jouer les VRP ? Quelles sont les relations entre Philippe Jentot et Philippe de Villiers l'ex et le nouveau propriétaires ? Quel rôle jouent les patrons vendéens ? Comment Michel Desjoyaux et Ellen MacArthur ont géré leur communication ? -
La bibliothèque de Hans Reiter
Jean-Yves Jouannais
- Grasset
- Martine Saada
- 3 Février 2016
- 9782246857778
« La croyance de Hans Reiter fut dès lors celle de tous les hommes de toute éternité et qu'ils ont désiré censurer, à savoir que la guerre - dans son cas la Seconde Guerre mondiale - était née non pas d'un quiproquo diplomatique, du caractère belliqueux d'une nation, d'un accident climatologique ou de tout autre phénomène naturel, mais d'une blague. Il en avait été le témoin. La guerre est une farce qui tourne mal. »
-
« Je savais aujourd'hui que les barrages contre les océans, les forts de résistance, les murs d'Hadrien en sable, les lignes Maginot de coquillages, ces discrets autels de l'enfance dédiés à la bataille, demeuraient, le plus innocemment du monde, ce que l'on avait trouvé de plus juste pour rappeler la mémoire des hommes perdus à la guerre, non pas seulement au sens statistique des pertes, mais au sens d'égarés. Les égarés, les combattus. Et que cela concernait, plus largement, l'ensemble des hommes qui nous avaient précédés, les pères, évidemment, en premier lieu. »
-
Océans est l'histoire d'une vie. A Monterville, station thermale de l'est de la France, les océans sont de lointains mirages... Pour Léo-Paul Kovski, petit-fils d'émigrés polonais, tendre et fantasque enfant des années soixante. Pour son père, conducteur d'une locomotive volée, qu'il rêve de faire un jour échapper à ses rails. Pour sa mère, infirmière, qui ne voudrait pas de limites à son dévouement. Pour ceux de son âge, ses amis, qui se cherchent et s'éveillent en même temps que lui. Pour Marie, l'amour de jeunesse, si longtemps inaccessible. Point de cyclones ni de déluge quand, après une longue fugue, Léo-Paul rencontre pour la première fois l'océan, lieu poétique et géographique de toutes les immigrations. Puis ce sera Paris, le travail, les femmes, la violence, l'écriture, la réussite... Et aussi l'étrange, la poésie, l'inquiétude, les voyages, la politique. Tout ce qui aura fait le paysage intellectuel et sentimental d'un jeune Français de notre époque : vingt ans de sa vie, admirablement saisis, retrouvés, reconstruits, à la lumière du réel et de la mémoire.
-
Adrien est fasciné par l'histoire de l'humanité et plus encore par les commencements : le jour où, pour la première fois, s'est redressé, sur les bords du lac Turkana au Kenya, celui qui, cessant d'appartenir au monde animal, allait inaugurer le règne de l'homme ; le jour où celui-ci a découvert qu'il pouvait s'autodétruire et annihiler l'univers, c'était à Hiroshima ; le jour, enfin, en juillet 1969 où trois Terriens ont marché sur la Lune. Trois commencements qui, pour Adrien, sont les trois étapes essentielles de l'humanité.
Sa rencontre avec Miléna, une jeune comédienne d'origine tchèque, est encore un commencement. Ils s'aimeront comme on s'aime à Paris au XXe siècle, loin des drames, dans l'illusion de l'éternité. Ils s'aiment tellement qu'un jour Miléna veut un enfant d'Adrien. Nouveau commencement, pour tous deux. Pour Miléna qui s'immerge dans la maternité amoureuse. Pour Adrien qui, découvrant la paternité, se retrouve lui aussi enceint, mais d'un autre enfant, imaginaire et secret celui-là, divaguant avec lui du lac Turkana à Hiroshima, de Paris à Cap Kennedy, étrange voyageur magnifique. -
Tout enfant déjà, le narrateur était amoureux d'une « riche étrangère ». Puis vient le jour où l'homme, jamais guéri, part à la découverte de son rêve, nouveau Colomb. New York est une femme nommée Luronne. Ensemble ils vont vivre « leur Amérique ». Celle des commerçants, celle des millénaires, avec ses espaces infini, ses exodes, ses Indiens, puis celle de la conquête, des massacres, qui est en même temps la terre de leur amour émerveillé. Qu'ils visitent les forêts inquiétantes par leur touffeur sauvage, les bayous de Louisiane où viennent mourir les oiseaux hallucinés, c'est la même célébration d'un mythe fascinant. Peuples sans histoire, peuples décimés, tous les Indiens ressuscitent ici par le seul miracle de la parole. Après tant de livres sur les Etats-Unis, celui d'Yves Berger est peut-être le premier roman vrai de l'Amérique. Ce n'est pas un songe ni un poèmes, bien que ce le soit aussi, c'est une histoire d'amour. Amour avec un monde, amour avec les aubes d'un passé fantastique, lyriquement rappelé à la vie. Amour avec une femme qui se perd peu à peu dans le sol qui la porte. On savait que l'auteur du Sud n'étais pas un romancier comme les autres. Après un long silence, le Fou d'Amérique nous le ramène soudain, mûri, éclatant, comme délivré. Une aventure commence : celle d'un grand écrivain.
-
Comment devenir le contemporain de Fenimore Cooper et du général Lee ? Comment respirer le parfum de Scarlett dans l'incendie d'Atlanta ou suivre, le coeur battant, les exploits de Mur de Pierres Jackson et ceux des héros de Jack London ? Comment revivre au présent l'immense légende américaine, depuis le jour où trois caravelles quittèrent l'ancienne Europe jusqu'à cet instant, béni entre tous, où un jeune Français découvre, à la fin de la dernière guerre, que les héros de ses songes libèrent son propre pays ? Telles sont, à grands traits, les questions qui, comme les thèmes d'un opéra, hantent les Matins du Nouveau Monde. On découvrira là, à travers les rêves intenses d'un adolescent d'Avignon, l'entrelacs de deux histoires : la sienne, celle de sa famille, à l'heure où l'armée allemande envahit la France et la piétine ; et l'autre, celle du Nouveau Monde, dont les mythes et les symboles furent sa première respiration. On passe ainsi de la défaite de Gettysburg à celle de 1940, de la chute de Richmond à l'éternelle débâcle du Sud face aux barbares qui, depuis des millénaires, déferlent du Nord. Gloire du Sud vaincu, humilié mais rayonnant d'un impérissable éclat...
-
Un jour, un homme entre, à cheval, "dans la partie du monde que gouverne le méridien de Smith and Son, dans l'hémisphère Nord, entre le cercle polaire arctique et le tropique du Cancer, par 408ø40 de latitude et 243ø60 de longitude". Pays que les cartes ont oublié d'enregistrer, dernière partie de la planète encore inexplorée, qu'Oregon, le cavalier sur sa jument Appaloosa, va parcourir dans l'enchantement et le bonheur répétés. Seul occupant du Pays qui, depuis ses origines, ne connaît que fleurs, arbres, animaux, jeux de lumière, Oregon va introduire une femme, Faustine, qu'il est allé chercher hors le Pays, bien sûr, par-delà la Frontière. Ils auront une petite fille, Salicorne, et tous trois vont tenter la grande aventure du bonheur, de recommencer, en mieux, la condition humaine enfin débarrassée du Mal et de la plus tenace des fatalités (au vrai, la seule), la mort. Un jour, l'idée vient à Oregon de se livrer à la culture des plantes, des légumes et des fruits oubliés. Ils ne peuvent, dans ce pays de magie, qu'être les plus beaux. Ce qu'ils seront et, par malheur, le bruit se répand de leur splendeur. Par milliers, une masse de malheureux, de marginaux, d'immigrés, se
-
"Adolescent, dans un livre qui est l'un des grands de notre temps, Nadja, d'André Breton, une phrase m'avait frappé : Breton lui faisait dire que la beauté absolue est indescriptible. A partir de là, au lieu de décrire des merveilles, il les reproduisait en photo. J'avais alors ressenti un malaise - sans aller plus loin. Ce malaise a perduré en moi et, au fil des ans, je me disais : comment peut-on douter de son instrument, la langue ? Dans la Pierre et le Saguaro, j'ai voulu donner à voir (expression et titre d'Eluard) la beauté absolue, pour moi (et pour tant d'autres), le désert américain. Celui du Sud-Ouest, riche de deux éléments emblématiques, l'un la pierre, dont les hauts lieux sont Grand Canyon, Bryce Canyon et ce Monument Valley que j'ai vu quatorze fois : chaque fois, en le découvrant et le redécouvrant, je suis tombé à genoux... L'autre, le saguaro, dit aussi cactus-candélabre, géant incroyable d'allure, de force, de splendeur, l'arbre-roi du désert de Sonora." (Y.B.) La Pierre et le Saguaro : à travers ces deux symboles, Yves Berger a écrit un livre comme tissé d'images. Roman minéral, cantique végétal, tout, ici, célèbre le descriptible bonheur de voir et de se perdre sur un territoire qui est, à jamais, celui des songes et de la littérature.
-
L'Attrapeur d'ombres (Shadow Catcher) : un Indien de la tribu des Nez Percés. Peut-être un personnage vivant, peut-être un être de fiction... Partout en Amérique il attend Yves Berger, le guide dans ses voyages, vieux et sans doute immortel, tourné vers le passé où il cherche des ombres, inlassable, et lui-même une ombre qui hante l'auteur du livre. Dans L'Attrapeur d'ombres, il précède, suit, escorte le narrateur de Los Angeles à Salt Lake City, dans la beauté de cinq parcs nationaux d'un Ouest dont l'écrivain ambitionne de faire "la conquête littéraire". On retrouve ici sa prose minérale, sa frénésie d'espace, sa religion incantatoire de la nature, toutes célébrations d'une Amérique particulière, celle d'Yves Berger.
-
D'un sommeil à l'autre, du sommeil de Naïma, nue dans une chambre avec Vladimir, au sommeil de Naïma, étendue sur une plage quelque part au bout du monde, cet étrange roman déroule l'aventure de deux êtres - deux amants, dirait-on, si le mot ne paraissait trop usé pour définir cette quête, cette rage qui les tourmente.Ils viennent de loin, d'un passé qui ne nous est pas dit, mais que nous devinons obsédant, d'où émergent encore, de temps à autre, quelques fantômes, tel cet homme aux yeux de sang. Mais ils vont plus loin encore, au-delà des dernières villes, au-delà des dernières campagnes, jusqu'à un désert jamais vu, plein de " coulées géantes, graves, avec des gorges volontiers funèbres, au sein de massifs écrasés, comme les débris d'un autre soleil ".Ils ont connu l'amour absolu et poursuivi l'antique rêve de possession, " ce vieux mythe qui tombe en ruines frissonnantes ". Mais Les Alephs, c'est bien autre chose, c'est bien plus qu'un roman d'amour : le récit d'un rêve au bout du temps et de la nuit, le voyage mystérieux de l'imagination onirique au coeur des puissances chtoniennes : le sang, l'érotisme, la mort.Dès son premier roman, il faut compter Yves Buin dans la lignée des visionnaires modernes, Julien Gracq, André Pieyre de Mandiargues.
-
En vingt-six entrées vives et accessibles, Yves Michaud pose son regard de philosophe sur les mutations à l'oeuvre dans notre société. YouTube, Narcisse, la Com', le Design, l'Hédonisme, le Sexe ou encore le People, s'entrecroisent et se répondent dans ce petit précis philosophique ultramoderne. C'est à contrecourant des discours alarmistes que le lecteur retrouvera son quotidien, ses obsessions et névroses. Il entrera dans cet abécédaire comme on tend devant soi un miroir, ou un smartphone, et se verra délivrer des clés à la compréhension du monde d'aujourd'hui et de demain.
-
En 1923, un jeune homme aux cheveux bruns et aux yeux noirs quitte sa province et débarque à Paris. Il y trouve les lumières des salons, l'ambiance des cocktails et des bals, le sourire des femmes. Trois d'entre elles l'attirent, l'entraînent, le protègent : Bettina, une belle américaine, manequin chez Schiaparelli, Lili de Chambure et Josée Laval. Réceptions, champs de courses, défilés de mode, dîners dans des hôtels particuliers, nuits interminables. L'hiver, il skie à Saint Moritz et séjourne l'été à Deauville, à Cannes ou à Antibes. Chez les Bourdet, les Faucigny-Lucinge, les José Maria Sert, Lucien rêve face à la mer et navigue sur les yachts des Rothschild et de Daisy Fellowes. Les robes ont pris les couleurs des fleurs, Lelong, Chanel, Balenciaga, les ont dessinées. Lucien travaille pour le magazine Vogue. Les années filent, oisives, douces. Chaque soir, l'orchestre joue : Jazz, tangos, valses, les têtes tournent. Soudain, l'histoire s'accélère. Lucien entre au service de celui que Bettina a épousé : Gaston B., député, chef de parti, personnalité ambiguë qui oscille entre la gauche et la droite et, pour finir, passe au fascisme. Il connaît aussi un journaliste, agent secret, Jean Fontenoy, mari de la belle aviatrice, Madeleine Charnaux. Avec lui, il fume l'opium. Les lumières des années trente s'éteignent. Dernière soirée à l'ambassade de Pologne, bal rose de Philippe de Rothschild, l'été 1939 s'achève. La guerre éclate. Paris est occupé. Pétain et Laval s'installent à Vichy. Lucien court après les lumières de la collaboration et le champagne coule encore. Sacha Guitry et Serge Lifar paradent, Cocteau passe et salue le sculpteur d'Hitler, Arno Breker. Lucien suit Gaston B., nommé ambassadeur à Moscou puis à Ankara. Il fréquente l'ambassadeur d'Allemagne, Von Papen, s'installe à Therapia, au bord du Bosphore. L'Histoire hésite : victoire ou défaite allemande ? Stalingrad retentit comme un cri. Les cartes ont changé de mains. De retour à Paris, Gaston B. est arrêté. Lili de Chambure est morte à Ravensbrück. José de Chambrun s'enferme dans son appartement de la place du Palais Bourbon. Mais le pire reste à venir : les regrets, ceux d'une vie gâchée et de l'insupportable lâcheté. Tout, désormais, paraît faux, vide, inutile. La vie n'a plus aucun sens.
-
Dans un parking souterrain, un homme va reprendre sa voiture. Une femme arrive en courant. Elle est essoufflée, elle a peur, elle dit : "Emmenez-moi !" Et ils partent ensemble dans Paris pour une histoire qui durera six mois. Parce qu'ils voudront aller jusqu'au bout des mots, ils transformeront les murs de leur appartement en roman en y écrivant tout ce qu'ils ne diront pas ou n'oseront pas se dire avec la parole. Comme Marilyn Monroe restée éternellement jeune et belle, ils voudront que leur histoire n'ait pas de fin et ne connaisse pas la tristesse de l'un des deux disant : "Tu ne m'attendris plus, alors je ne t'aime plus !" Ils s'inventeront une vie à côté de la banalité parce que chaque seconde sera la leur et qu'ils en seront les héros.
-
"Derrière ces murs impénétrables
des fêtes sont célébrées."
KRESTCHMER