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Seuil (réédition numérique FeniXX)
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L'homme qui parle ici reconnaît qu'il a tué sa femme, Jintana Sethiu, la Viêtnamienne. Il expose minutieusement les raisons de ce meurtre. En réalité, toute femme lui est étrangère. Toute femme est méprisable à ses yeux depuis la mort de sa mère et celle, surtout, de Nora, sa soeur, droguée et prostituée (dit-il). On l'appelle le veilleur. Il a longtemps occupé l'emploi de vigile dans un centre commercial. Il pose sur le monde un regard inquisiteur et maniaque. Le veilleur se croit un homme sans pareil, et sans reproche. Or, chaque mot qu'il prononce aggrave son cas. Déclaré irresponsable, interné, il ressasse l'instruction de l'affaire, l'interrogatoire. Ce roman (sarcasme, diffamation) se présente donc comme un monologue à deux voix - la conjuration de quelques démons tenaces. Au premier rang desquels, singulièrement, la misogynie. Le veilleur fulmine, profère, implore. Au-delà des femmes, il est allergique à l'idée de communauté, de race, de nation. Il voyage pourtant ; prend de la hauteur ; évoque le Viêt Nam, l'Amérique centrale ; s'égare à Belize City ; dresse un tableau grinçant de la décolonisation : c'est un homme de notre temps. Ou plutôt, c'est un homme privé de discernement, que notre époque affole.
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Le monsieur imaginaire
Yves Vequaud
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- Écrire
- 26 Avril 2018
- 9791036900587
Cet ouvrage est une réédition numérique d'un livre paru au XXe siècle, désormais indisponible dans son format d'origine.
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Un enfant naît, un enfant meurt : de son apparition à son enterrement, quinze jours de joie, d'angoisse, de tristesse. Les témoins de cette « existence » sont ses parents, les médecins, les infirmières, qui luttent ; puis les employés des pompes funèbres, qui font leur métier. Comme la mort, la douleur qu'elle provoque n'a nul besoin d'être commentée. Il lui suffit d'être dite avec les mots les plus simples ; d'autant plus émouvants qu'ils invitent au silence.
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Marchands de participes (2)
Yves Sandre
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 18 Mars 2019
- 9791036903045
Ce second volet de "Marchands de participes" - roman de "la condition de l'instituteur" - embrasse la période 1880-1910. La geste des Ranson continue avec Joseph qui, à l'encontre de son père, le pieux Jean-Baptiste, a pris le parti de la nouvelle Instruction publique - laquelle ira en se laïcisant. Elle se prolonge avec Marie, l'aînée des quatre enfants de Joseph, déjà fortement marquée - signe des temps - par "la morale laïque". Elle aussi deviendra institutrice, mais non sans sacrifier son bonheur personnel à une haute idée du devoir qui fait d'elle, exemplairement : "Marie des autres".
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Circulez, y'a rien à négocier !
Michel Ghazal, Yves Halifa
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 18 Septembre 2019
- 9782021444285
Pourquoi, pendant le très dur conflit de novembre-décembre 1995, M. Juppé a-t-il eu tellement de difficultés à prononcer le mot « négocier » ? Pourquoi, si souvent, à l'intérieur ou à l'extérieur des entreprises, entre les groupes d'intérêt, les partis, etc., met-on une immense énergie à durcir les positions, à exiger la soumission ou l'écrasement de l'autre au lieu de négocier ? En analysant un cas dont tous ont été témoins, Michel Ghazal et Yves Halifa montrent comment les blocages les erreurs tactiques, les défauts d'appréciation transforment un différend en crise coûteuse. Ils indiquent très concrètement ce qui aurait dû être fait pour inverser le processus. Ils donnent à tous les responsables (ou candidats responsables) les moyens de mieux gérer les conflits inévitables et rendent à la négociation ses lettres de noblesse.
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Histoire et légendes du Club Méditerranée
Christiane Peyre, Yves Raynouard
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 13 Décembre 2017
- 9782021266221
Le Club Méditerranée est la seule organisation en France qui partage avec le Parti communiste l'étrange privilège de ne laisser personne indifférent. On est pour ou on est contre, sans trop savoir pourquoi. Comme Cap Kennedy ou Baïkonour, l'organisation de ces conquérants de l'espace lointain des plages, de la mer et du rêve, qui nous promettent le soleil - et non pas, du moins dans l'immédiat, la lune est environnée de mystères. Qui sait qu'elle n'était, en 1950, qu'une poignée de joyeux lurons découvrant « que tous les tracas sont solubles dans l'eau salée de mer », inventant l'art de ne rien faire et décidant que les vacances, ce doit être le temps de redevenir sauvage, de s'entr'aimer librement, d'être « gentils » les uns avec les autres et de faire la fête même si ce n'est pas tous les jours dimanche ? C'était génial. Une preuve : c'est devenu un modèle cent fois imité, un mythe, le creuset d'inventions pour modes nouvelles, habitudes nouvelles et utopies dont quelques-unes parfois se réalisent et puis, finalement, une fois cette société secrète transformée en société anonyme, une bonne affaire en Bourse... L'histoire du Club Méditerranée ? Une épopée qui se mue parfois en légende. De l'imagination à foison, de la débrouillardise, de l'improvisation, un état d'esprit, de l'enthousiasme, des colères homériques, des virages sur les chapeaux de roues, des sommets éblouissants, des marécages redoutables, l'image d'une possible société future aussi bien que le refuge d'une masse d'évadés qui démissionnent entre les mains d'une organisation-tutelle : bref, un concentré de civilisation moderne dont l'histoire est un peu celle de notre temps. Raconter cette histoire, ce n'est pas toute l'ambition de ce livre vraiment « G.M. » (gentiment méchant). Elle est aussi de revenir sans cesse sur cette grande question qui se pose aujourd'hui pour les vacances comme pour tout le reste de notre vie quotidienne : le bonheur qu'on achète sur catalogue, en tranches prêtes-à-consommer, peut-il toujours être le bonheur ?
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L'usurpé
Yves Mabin-Chennevière
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- Écrire
- 26 Avril 2018
- 9791036900426
Chrysogone assiste à l'exposé de sa vie vécue sans lui. On l'appelle. Il part. Anonymement fusillé, il s'absente un moment. Il rencontre Émilienne. Elle lui parle d'elle. Ensemble ils vivent une journée toute consacrée à d'autres qu'eux-mêmes. Il essaie ainsi de confondre ceux qui s'emparent de lui. En vain. Convié à dîner, il assiste au viol d'Émilienne, qui l'empêche d'intervenir. Elle agonise, il assiste aussi à sa mort. S'en absente. Poignardé, anonymement, il s'absente pour de bon. Soleil. Émilienne et les autres ont usurpé sa vie. Un homme qui assiste à l'appropriation de sa vie - de la naissance à la mort - par l'ignorance, l'insouciance, le mensonge, la violence, le sacrifice des autres, et qui naît, vit et meurt, envahi par tout et par tous à l'exception de lui-même, est un Usurpé.
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L'héritage et vous
Arnaud De Sercey, Florence Kahn, Yves Mahot De La Querantonnais
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 22 Juillet 2019
- 9782021444216
Successions, héritages, testaments ont depuis toujours été la source de bien des querelles. Combien auraient pu être évitées si ces transmissions de patrimoine avaient été préparées ? Mais pour cela, encore faut-il savoir quelles sont les règles du jeu en la matière, quels sont les droits de chacun, etc.
Précédé d'une préface sur certains enjeux de l'héritage et complété par de nombreuses annexes (lexique, coût des actes notariés, consultations gratuites, etc.), ce guide pratique aborde concrètement tous les aspects de la question :
1. Vous allez hériter: Qui hérite ? Qui est responsable ? Que faire ?
2. Comment transmettre votre héritage ? Vous ne prévoyez rien : que se passera-t-il ? Vous organisez votre succession : quelle formule choisir ?
3. Votre héritage et la fiscalité: Comment rédiger une déclaration de succession ? Comment calculer l'impôt sur une succession ? Dans quels cas peut-on bénéficier d'un paiement différé ou fractionné ? Les exonérations.
Pierre-François Divier. Né en 1946. Avocat au barreau de Paris. Auteur ou directeur de nombreux ouvrages sur la défense des consommateurs.
Florence Kahn. Née en 1947. Journaliste.
Yves Mahot de la Quérantonnais. Né en 1949. Notaire à Paris.
Arnaud de Sercey. Né en 1957. Journaliste -
Dictionnaire économique et financier
Gaston Banderier, Christian Begin, Yves Bernard
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 26 Avril 2018
- 9782021260120
Dictionnaire des termes économiques et financiers en arabe, français, anglais, allemand, espagnol. Commentaires en arabe. « Copyright Electre »
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En 1915, le peuple arménien de Turquie, qui avait déjà connu de nombreuses persécutions, fut victime, de la part du gouvernement turc, d'une tentative d'anéantissement à peu près complet. Sur 1 800 000 personnes, 1 200 000 périrent. C'est, avant l'holocauste juif et l'autogénocide cambodgien, le plus effroyable massacre de l'histoire d'un siècle qui en a connu tant d'autres. Aujourd'hui, les Arméniens sont partagés entre une République en Union soviétique et une diaspora répandue en Europe, au Moyen-Orient, en Amérique et en Australie. En 67 ans de revendications et de combats, le peuple arménien n'a même pas obtenu la reconnaissance de son malheur : d'où, à l'instar des Palestiniens, le développement d'un terrorisme arménien principalement dirigé contre les intérêts turcs à travers le monde. Minutieux, objectif et courageux, le livre d'Yves Ternon constitue une véritable somme de la question arménienne au XXe siècle.
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La Société du vide
Yves Barel
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- Empreintes
- 18 Février 2016
- 9782021262728
La France, en ce début des années 80 - comme d'autres sociétés occidentales -, traverse un étrange passage à vide. Des individus, des groupes, les intellectuels eux-mêmes, paraissent se mettre en retrait du social et de l'idéologie. Derrière la cacophonie trompeuse de l'information, règne, en fait, un énorme silence. Comme une panne de la production de sens, une panne de toute transcendance. Le vide social, cette crise multiforme, n'est pas la fin de l'histoire, mais une sorte de ruse partagée confusément par tous, une manière de vivre en attendant. Mais en attendant quoi ? Quelle prodigieuse mutation ce vide prépare-t-il ? Quel est le lien entre cette crise de la société civile et de l'État, et les nouvelles pensées qui se cherchent autour de notions comme celles d'autonomie ou de système ? La société du vide d'Yves Barel est sans doute la première analyse en profondeur de ce qu'on appelle de manière trop simpliste la crise. Elle ouvre vers l'avenir des chemins encore largement inexplorés. Ce n'est pas si fréquent.
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La Quête du sens
Yves Barel
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- Empreintes
- 25 Décembre 2015
- 9782021256314
Aucun individu, aucun groupe et pas une société ne peuvent se passer - durablement - de produire du sens. Du sens, c'est-à-dire un horizon discernable, un système de références, un fondement quand ce n'est pas, plus modestement, une simple raison de vivre, de survivre et d'espérer. Ils s'y emploient donc et y parviennent, même quand, périodiquement, le défi, le déni ou le dépit veulent tuer ou exténuer le sens. Mais produire du sens fut sans doute, dans l'histoire, l'entreprise la plus difficile qui soit. Et elle le reste. Il s'agit d'unir ce que tout devrait opposer : le sens venu ou imposé de l'extérieur - la transcendance - et celui - immanence ou autoréférence - venu de l'intérieur. Cette question du sens hante aujourd'hui plus que jamais nos sociétés au ciel vide, nos groupes en panne de transcendance. Or, les Grecs, en leur temps, et en même temps qu'ils inventaient la politique - ce qui n'est pas un hasard -, ont créé la matrice vers laquelle maintenant encore nous retournons quand nous voulons créer du sens, ruser avec lui, apprendre même - provisoirement - à nous en passer. Comment les Grecs ont su résoudre cette question fondamentale, voilà ce que Yves Barel propose ici de raconter. Si ce livre était un roman ce serait un roman à clefs. Car c'est bien de nous, en cette fin du XXe siècle, qu'il est aussi question.
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Arrêté à dix-huit ans pour actes de résistance, Yves B éon fut déporté à Buchenwald, puis à Dora, où il arriva, le 13 mars 1944, sous une tempête de neige. Dora n'était pas un camp d'extermination comme les autres. Après la destruction par les Alliés, en 1943, de la base de Peenemünde, l'Allemagne nazie avait décidé de transférer la fabrication de ses armes secrètes, les fusées V2, en un site inviolable, sous les collines du Harz, en Saxe. Pour ce faire, elle disposait d'une main-d'oeuvre qu'il lui suffisait d'aller prendre au camp voisin de Buchenwald. À partir d'août 1943, le nouveau camp de Dora, l'un des plus sanglants que le régime hitlérien ait créés, accueillit les détenus par milliers. Ils creusèrent la montagne, construisirent l'usine souterraine, un modèle du genre. Ils y connurent des conditions inimaginables et y moururent pour la plupart. Des milliers d'autres prirent leur place, comblèrent les vides pour quelques jours ou quelques semaines, avant de subir un sort identique. Seuls quelques-uns réussirent à échapper à l'inéluctable, à sortir de l'enfer. Yves Béon a été l'un de ceux-là. Quarante ans après, il se souvient. Pour lui et pour nous. Pour ceux qui auraient la mémoire courte. Son récit est plus qu'un cauchemar de science-fiction, l'histoire en tous points authentique de la planète Dora, qui vogue à des millions d'années-lumière de notre univers. Et pourtant Dora-la-maudite vivra aussi longtemps que les hommes, aussi longtemps que la Terre...
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L'Europe aux anciens parapets
Pierre-Yves Pétillon
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- Fiction & Cie
- 16 Mars 2017
- 9782021246827
Chaque fois qu'un monde meurt et qu'un autre tarde à naître, l'on voit surgir, sporadiquement, l'espace d'un entretemps, des signes que seuls certains écrivains semblent avoir enregistrés, eux qui ont vu, avec l'éclipse du monde ancien, se disloquer leur propre monde. À travers leur propre histoire, c'est aussi le récit des origines de leur nation qu'ils veulent retracer, mais la mutation des temps, lentement et brusquement, effondre le sol sous eux. Se tenant sur la précaire ligne de fracture, ils tentent en vain de restaurer le monde qu'ils ont perdu, projetant dans le passé un enclos stable, calfeutré et sans failles, jeu d'illusion et de bascule entre la conservation d'une mémoire et l'attente convulsive des derniers jours. C'est ainsi que les émigrants puritains, laissant derrière eux les clochers de Cambridge, sont partis outre-Atlantique établir la plantation du Seigneur (on verra ce qu'Henry Adams en fera) ; qu'à Chicago, dans le Middle-West amorphe, des échos vont répondre à la geste impériale déployée, autrefois, depuis léna (Bellow, pas très loin de Rilke). Ainsi certains auront-ils largué leurs amarres, alors qu'en d'autres temps, d'autres lieux, l'écroulement, le dépaysement se sera fait sur place : à Vienne (Hofmannsthal), ou en Irlande (Yeats et Synge), bastion monolithique à l'ancre dans une très vieille mémoire.
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Marchands de participes
Yves Sandre
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 27 Février 2019
- 9791036903038
Les "marchands de participes" sont les instituteurs de l'âge héroïque : entre 1824 et 1880. Une geste familiale, celle des Ranson, relate ce que fut leur existence quotidienne et comment leur condition évolua, de la loi Falloux à la laïcité de Jules Ferry, en passant par les réformes de Victor Duruy. Trois générations, si l'on compte le grand-père Jacques Ranson, quincaillier failli et poète, qui tente d'ouvrir une école dans son village du Briançonnais ; et le petit-fils, Joseph, qui recevra la formation normalienne. Mais à la charnière s'impose la forte figure de Jean-Baptiste, un "dévorant" en son genre, bien-pensant, pétri de principes autant que de muscles. C'est lui le héros exemplaire. Luttes avec soi-même, avec ses proches, avec les maires ou les curés, ou avec ceux-ci et ceux-là, pour des motifs opposés : son destin pèse le poids d'un demi siècle d'histoire.
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La statue de Condillac retouchée
Yves Velan
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 22 Décembre 2017
- 9782021249460
Ce roman se développe comme une psychanalyse, celle d'un homo occidentalis des années soixante, qui part convaincu de savoir - du savoir marxiste -, et de pouvoir tout illustrer à partir de là. Et puis, les figures qu'il a mises en place - l'intellectuel un peu anarchisant, Guillaume ; le couple de petits bourgeois, l'Étréci et sa femme Mes Droits ; le promoteur du capitalisme avancé, le Maître de Directo, et sa femme Anne ; le peintre américain, L ; le militant stalinien, Sentence -, les structures économiques et sociales qu'à travers ces figures il expérimente, la langue même dans laquelle, en tant que romancier, il travaille, tout cela lui résiste, lui échappe, le fait achopper. Et c'est chaque fois le corps, ainsi, (et avec lui le silence) qui se manifeste, qui interrompt le discours, qui l'oblige à repartir. À travers chaque étape du roman - l'exploitation du commerce de luxe, ou la « Caverne » ; le suicide de L ; le désir de Guillaume pour Anne... - la promesse d'une évidence s'enlise dans la lecture d'un sens concret qui ne se laisse pas réduire. Et si le capitalisme avancé pouvait réussir ? Et si les humeurs du corps conservaient leur épaisseur en face de toute pensée ? Et si qui veut démontrer se devait confesser, à la fin, romancier ? Romancier, oui, et d'un des gestes les plus significatifs de ce temps. Car nous savons aujourd'hui que, bien davantage que celles - imaginaires - de la personne, les dimensions du concret (et du conte) sont celles de l'économie, du désir, du mot.
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Yves Bertherat était l'un des nôtres, à la revue "Esprit". Médecin psychiatre à l'hôpital de Vaucluse (Epinay-sur-Orge), il fut tué de deux balles de revolver par un malade qu'il croyait apaiser par la parole.
La parole ! Il ne croyait qu'en elle, se faisant plus attentif encore si elle s'emparait de telle créature pour la mener au-delà des limites. Hlderlin, Nerval, Nietzsche, Artaud le fascinaient parce qu'ils avaient fait l'expérience des gouffres et de la foudre. Yves Bertherat savait que le poète est l'homme qui parfois passe outre, au risque de ne plus revenir. Est-ce en médecin, est-ce en poète (mais ces deux en lui ne se dissociaient pas) qu'il alla par ce matin d'octobre au-devant de son frère humain pris dans le labyrinthe ? Et lui portait noué au coeur et à la bouche ce fil d'Ariane par lequel, il en était sûr, devait être délivré le prisonnier... Coeur navré, bouche muette: mais le fil n'est pas rompu que le chant perpétue...
Les traces en sont ici recueillies.
De sa poésie, le poète aimait à dire qu'elle avait racine dans quelques arpents d'un village de Savoie. A cette terre originelle le germe est retourné qui avait donné naissance au poème temple lui-même né d'une graine pour la seconde fois enfouie.
Robert Marteau
Né le 5 juin 1932 à Grenoble. Après être passé par le collège Saint-Michel d'Annecy, il fit ses études de médecine à Lyon. Mobilisé en Algérie en 1958, il y passa 27 mois qui comptèrent pour lui. Reçu à l'internat des hôpitaux psychiatriques, puis au médicat en 1963.
Médecin à l'hôpital de Perray-Vaucluse, il fut appelé, le matin du 15 octobre 1967, par des infirmiers qu'un malade mental menaçait d'un revolver. Yves Bertherat fut tué à bout portant. Membre du comité directeur d'" Esprit", Yves Bertherat a donné à cette revue, outre des poèmes, plusieurs articles sur l'Algérie, le théâtre, la psychiatrie, la pensée de Michel Foucault. Il a aussi publié plusieurs études spécialisées dans "L'Information psychiatrique". -
La Grand-route
Pierre-Yves Pétillon
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- Fiction & Cie
- 9 Octobre 2015
- 9782021246674
Cet essai voudrait ouvrir comme une perspective cavalière sur le siècle et demi de fictions américaines qui va de 1819 (l'année de ces deux fables liminaires : Sleepy Hollow et Rip Van Winkle) à l'été 1969, celui de Woodstock et du grand envol vers la Lune. Lecture qui cherche à localiser, nichées au coeur de ces fictions, quelques hantises dont Whitman reste, depuis le XIXe siècle, le lieu géométrique et qui se récapitulent aujourd'hui dans le Gravity's Rainbow de Thomas Pynchon, point focal de cette analyse. Écrire l'Amérique, ce serait cartographier, s'empoigner avec le vaste in-folio du continent déployé afin de le déchiffrer et d'en prendre possession. Ce corps-à-corps tumultueux, une double terreur le scande : pour exorciser la vacance de cet espace sauvage et vague, il faut y tracer lignes et marques, y projeter la grille d'un cadastre, mais c'est au risque alors de se retrouver, tel le scribe Bartleby dans ses écritures, captif, pris au piège des enclos. Une stratégie baroque du projet et de l'esquive sans cesse vient échouer sur la frange du rivage, dans une oscillation panique entre le cri, qui arrache aux empreintes anciennes l'espace neuf, aboriginal, de la fugue, et la dislocation, collapse entropique jusqu'au point mort autour duquel le monde gravitait et où, clôtures effondrées, il s'efface pour raviver, au lieu zéro, le fugace éclat de la baleine. D'où, si souvent, ce double tropisme : la cavale : d'Est en Ouest, on se fraye, au grand galop, une route, élan puritain qui fonce, conquiert, dévaste, et le sommeil : s'enfonçant au creux des terres, on exhume une autre carte, une autre version du corps de l'Amérique, l'Amérique perdue, à peine esquissée que déjà enfouie, de la dérive au fil du fleuve, Nord-Sud jusqu'à l'ombreuse torpeur du Delta, la haute mer et ses hosannas.
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L'atelier de la folie
Yves Heurté
- Seuil (réédition numérique FeniXX)
- 18 Septembre 2019
- 9791023513691
Libertad, prison politique en Amérique latine. Une étudiante de la grande bourgeoisie est arrêtée par erreur et jetée dans la cellule d'une fille du peuple. En échange de son silence sur cette bavure, elle exige la libération de sa compagne de cellule. Le « psychologue » de la prison, raté pervers, s'évertuera à la convaincre d'abandonner cette idée. Mais la jeune fille s'en tient à son marché. Pour se débarrasser du problème, la police éliminera son amie. L'étudiante ne cède pas, tandis que les échos de la révolution montent autour de la prison... Cette histoire violente, fondée sur un fait divers, est ici tempérée par l'humanité des personnages.