Consommateurs ou travailleurs, nous sommes quotidiennement exposés à de nombreuses molécules de synthèse, aux effets parfois dangereux. Pourtant, l'émergence de pathologies afférentes à ces substances, fausses couches ou cancers par exemple, reste controversée. À partir du cas, aux États-Unis et en France, d'une famille de solvants toxiques, les éthers de glycol, Jean-Noël Jouzel décrit la mobilisation des avocats, syndicats, associations de consommateurs et autres collectifs engagés dans la reconnaissance de la nocivité de ces substances. En comparant les carrières contrastées de cette cause de part et d'autre de l'Atlantique, il met en évidence les contraintes politiques, économiques et légales qui pèsent sur les formes d'enquêtes étiologiques que déploient ces acteurs. Ainsi, ces mouvements sociaux contribuent à la fois à rendre visibles mais aussi à laisser dans l'ombre les effets pathogènes du monde qui nous entoure. Par une approche comparée des enjeux en matière de santé environnementale, ce travail ethnographique construit une sociologie des problèmes publics « à bas bruit » et met en lumière les dynamiques de construction sociale de l'ignorance.
Cet ouvrage se veut un hommage critique à l'oeuvre de Paola Tabet, anthropologue féministe qui contesta dès les années 1980 la distinction convenue entre sexualité « ordinaire » et sexualité « commerciale ». Des maisons de passe en Bolivie aux clubs libertins parisiens, de l'homosexualité au Maroc aux mariages de convenance, il propose de repenser les logiques de l'échange économico-sexuel et des rapports de genre qui le fondent. Le regard de chercheurs de terrain montre combien sont ténues les frontières qui séparent intérêts et sentiments, contraintes et plaisirs, égalité et domination. En définitive, les transactions sexuelles apparaissent conditionnées par des rapports de pouvoir où interviennent en particulier la classe sociale, la « race », l'âge ou l'orientation sexuelle.
Comment rendre compte de l'expérience du sida ? La démarche originale de Sébastien Dalgalarrondo - suivre des molécules, des laboratoires à la diffusion des traitements - permet d'éclairer sous un nouveau jour les relations complexes et trop souvent caricaturées entre quatre protagonistes : médecins, laboratoires pharmaceutiques, pouvoirs publics et associations de malades. L'enquête révèle les effets néfastes d'une recherche clinique dominée par les enjeux économiques où la science côtoie le marketing. Elle souligne les avantages mais aussi les risques d'une intervention des « profanes » dans le champ exposé de l'innovation médicamenteuse. Elle nous rappelle qu'il serait naïf de voir dans les mouvements associatifs, aussi experts soient ils, une nouvelle incarnation du bien public.