Sur la piste du Covid-19, les chauves-souris restent le suspect n°1 des virologues dans la transmission du virus à l'homme. Mais d'autres facteurs, bien humains, ont contribué à abolir la « barrière des espèces » et à propager l'épidémie dans le monde entier : la déforestation accélérée, le commerce lucratif des animaux sauvages, l'explosion du trafic aérien et le réchauffement climatique. Ce livre décrit les mécanismes par lesquels le capital, dans sa quête de profit sans fin, produit le risque épidémique comme l'effet de serre, sans fin. À l'échelle microbienne comme atmosphérique, l'urgence est devenue chronique - et ne rien faire serait fatal.
S'appuyant sur l'expérience inédite de ces derniers mois, Andreas Malm appelle à mettre en oeuvre des politiques écologiques radicales à grande échelle ; il rappelle aussi que sur le front climatique, aucun « retour à la normale » ne sera possible et que les demi-mesures bureaucratiques ne suffiront pas. Si nous ne voulons pas vivre sur « une planète enfiévrée habitée par des gens fiévreux », il faut des méthodes révolutionnaires.
Du delta du Nil aux cercles polaires, le constat est effrayant : la Terre se réchauffe dans des proportions qui nous mènent aujourd'hui au seuil de la catastrophe. Le concept d'Anthropocène, s'il a le mérite de nommer le problème, peine à identifier les coupables et s'empêtre dans le récit millénaire d'une humanité pyromane. Or si l'on veut comprendre le réchauffement climatique, ce ne sont pas les archives de « l'espèce humaine » qu'il faut sonder mais celles de l'Empire britannique, pour commencer. On y apprend par exemple que dans les années 1830 la vapeur était, aux mains des capitalistes anglais, un outil redoutable pour discipliner la force de travail et une arme de guerre impérialiste ; on y suit la progression fulgurante de la machine mise au point par James Watt qui supplante en quelques années la force hydraulique - pourtant abondante et moins chère - dans l'industrie textile anglaise. En puisant dans les sources de l'histoire sociale, ce livre raconte l'avènement du « capital fossile », ou comment la combustion ininterrompue de charbon a permis de repousser les limites de l'exploitation et du profit.
Il faut couper la mèche qui brûle avant que l'étincelle n'atteigne la dynamite, écrivait Walter Benjamin dans un fragment célèbre, « Avertisseur d'incendie », où il insistait sur la nécessité d'en finir avec le capitalisme avant qu'il ne s'autodétruise et emporte tout avec lui. Pour Andreas Malm, on ne peut pas mieux dire l'urgence contemporaine de défaire l'économie fossile par des mesures révolutionnaires.