Le Quartanier
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Donaublau, 1963. Berta, depuis longtemps internée, reçoit la visite de son ex-mari, Wilhelm. Chauffeur et homme à tout faire, « représentant souriant de sa nation », il s'est entre-temps lié à Wilhelmine, amie de Berta.
Pendant leur mariage, Berta, farouche et pensive, a tenté de se résigner à la vie domestique et de sauver ses enfants ainsi qu'elle-même du poids des choses. Avant que le drame ne la prive de parole, elle avait pour habitude de dire : « Un homme te fait une promesse et tu es perdue. » Le premier fut Rudolf, fiancé qui l'a mise enceinte puis est mort sur le front de l'Est sous les yeux de son frère d'armes, Wilhelm.
Ce roman satirique, diamant noir primé à l'humour féroce, est le premier de Marianne Fritz, autrice d'une oeuvre culte en Autriche, admirée par Jelinek et Sebald. À la rigidité petite-bourgeoise de l'après-guerre elle oppose dans ce livre une écriture de rêves, de désirs et de souvenirs, et par là esquisse pour son héroïne une échappatoire à sa condition. -
Mathilde est travailleuse sociale. Elle voit toute la journée défiler des personnes en difficulté et fait de son mieux pour les aider. Mais quand elle apprend pourquoi ses voisins Mohammed et Nadia sont menacés d'expulsion, elle comprend que les dispositifs légaux seront inutiles et qu'il va falloir se salir les mains.
Quarante-six ans, ancienne judoka de haut niveau, massive et mutique, Mathilde puise dans son passé ténébreux la volonté d'en découdre, et pourquoi pas de refermer enfin, douze ans plus tard, de douloureuses blessures.
La place carrée, c'est un quartier populaire dans une ville moyenne de province.
Mathilde ne dit rien est le premier volet d'une série qui s'intéressera à ses habitants, à leurs parcours, leurs magouilles, leurs espoirs, leurs fantômes. -
Quand son père, atteint d'un cancer en phase terminale, lui demande de le conduire de Hanovre jusqu'en Suisse, dans une clinique d'aide au suicide, Martha appelle en renfort Betty, son amie depuis vingt ans. Commence alors une odyssée burlesque, qui se prolongera en Italie, où Betty tentera de retrouver la tombe de son beau-père tromboniste et menteur, dans l'espoir de se libérer d'un pan douloureux de son histoire personnelle: le roman de la route devient polar.
De Berlin aux Cyclades, au fil des rebondissements et des rencontres, Betty et Martha cherchent un père, des pères, et se déprennent du regret des occasions manquées. Dans une langue innervée d'un humour acide et d'une gouaille mélancolique, Lucy Fricke mène ses héroïnes, deux femmes de quarante ans soudées par les confidences et l'alcool, vers une vie délestée. -
Laura est infirmière.
Tonio est petit dealer.
Laura est amoureuse.
Tonio saisit une belle opportunité.
Laura aimerait tout quitter, mais Marion est en couple.
Tonio en a marre de jouer les seconds rôles.
Et il y a tous les autres, qui s'impatientent, qui s'entraident, qui magouillent, qui cherchent une issue. Thierry n'a plus rien pour payer les couches de la petite. Zacharie est prêt à livrer n'importe quoi à n'importe qui. Idriss se demande quand l'école va rouvrir. Bolleg cogne sur tout ce qui bouge. Le Manouche replonge dans son passé, et son chien ignore pourquoi il porte un nom serbe.
Un an après les événements de Mathilde ne dit rien, les habitants de la place carrée sont frappés par la pandémie et voient leur vie chavirée par le confinement. Entre pression croissante à l'hôpital de Monzelle et règlements de comptes chez les dealers, leurs destins vont s'entremêler dans le tourbillon d'une histoire addictive et impitoyable. -
Le quotidien de Sabrina, c'est deux enfants, une mère, deux ex-maris et les quinze élèves de la classe de maternelle, petite section, où elle travaille comme ATSEM. Alors quand une réfugiée ukrainienne fait irruption dans sa vie, elle n'imagine pas à quel point son petit monde va être bouleversé. Car la jeune femme n'arrive pas seule; deux hommes inquiétants, à l'accent de l'Est, sont apparus dans le quartier et posent des questions aux habitants.
À quelques jours d'une élection présidentielle marquée par le désintérêt et la haine, alors que le pays se demande quelles seront les conséquences économiques de l'invasion de l'Ukraine par la Russie, l'étau se resserre sur la place carrée.
Épaulée par ses amies Zineb et Mathilde, Sabrina devra affronter tous ses démons, et surtout ceux des autres. -
Si Friederike Andermann n'avait pas cru en son travail, elle n'aurait pas gravi un à un les échelons de la carrière diplomatique ni supporté l'ennui de la bureaucratie ministérielle, l'angoisse de la zone verte à Bagdad et le désarroi de se voir démise de ses fonctions d'ambassadrice d'Allemagne en Uruguay après le meurtre d'une ressortissante, fille d'une baronne de la presse.
Devenue consule à Istanbul, Fred s'efforce d'obtenir la libération de Meral, intellectuelle dissidente à la santé qui décline, et d'aider son fils, interdit de sortie du territoire pour avoir participé à une manifestation pro-kurde à Berlin. Quand elle découvre que les autorités turques tiennent cette information de la police fédérale allemande elle-même, et que son ami journaliste se retrouve à son tour dans le collimateur du régime, Fred décide de prendre les choses en main.
Avec cette satire politique pince-sans-rire, Lucy Fricke signe un roman brûlant d'actualité, sur la fragilité des relations internationales, les dérives autocratiques et la diplomatie de crise. Elle dresse le portrait d'une femme d'action qui a dû apprendre la patience, d'une diplomate jusqu'ici exemplaire qui, tiraillée entre sa mission et ses idéaux, refusera de rester impuissante. -
Rivés à leurs écrans, les agents veillent à la bonne marche d'un monde qui tourne sans eux. Dans des box blindés, dans de hautes tours de verre d'un autre siècle, ils travaillent et luttent pour conserver leur poste, buvant du thé, s'achetant des armes. Tous les moyens sont bons. Ruse, stratégie, violence - guerre totale. Parce qu'il y a pire que la mort, pire que la Colonne Rouge. Il y a la rue, où règnent les chats, le chaos, l'inconnu.
Roman dystopique aux accents kafkaïens, dans la lignée du J. G. Ballard de la trilogie de béton et des oeuvres obsessionnelles de Philip K. Dick, Les agents raconte un monde où l'aliénation du travail est devenue la loi généralisée et machinique en vertu de laquelle tous s'affrontent pour survivre - où la solidarité est une arme à double tranchant. -
Nous sommes à Montréal au début de l'hiver 2002. Le narrateur n'a pas vingt ans. Il aime Lovecraft, le métal, les comic books et la science-fiction. Étudiant en graphisme, il dessine depuis toujours et veut devenir bédéiste et illustrateur. Mais depuis des mois, il évite ses amis, ment, s'endette, aspiré dans une spirale qui menace d'engouffrer sa vie entière : c'est un joueur. Il joue aux loteries vidéo et tout son argent y passe. Il se retrouve à bout de ressources, isolé, sans appartement.
C'est à ce moment qu'il devient plongeur au restaurant La Trattoria, où il se liera d'amitié avec Bébert, un cuisinier expérimenté, ogre infatigable au bagou de rappeur, encore jeune mais déjà usé par l'alcool et le speed. Pendant un mois et demi, ils enchaîneront ensemble les shifts de soir et les doubles, et Bébert tiendra auprès du plongeur le rôle de mentor malgré lui et de flamboyant Virgile de la nuit.
On découvre ainsi le train survolté d'un restaurant à l'approche des fêtes et sa galerie mouvante de personnages : propriétaire, chef, sous-chefs, cuisiniers, serveurs, barmaids et busboys. Si certains d'entre eux semblent plus grands que nature, tous sont dépeints au plus près des usages du métier, avec une rare justesse. C'est en leur compagnie que le plongeur tente de juguler son obsession pour les machines de vidéopoker, traversant les cercles d'une saison chaotique rythmée par les rushs, les luttes de pouvoir et les décisions néfastes.
OEuvre de nuit qui brille des ors illusoires du jeu, Le plongeur raconte un monde où chacun dépend des autres pour le meilleur et pour le pire. Roman d'apprentissage et roman noir, poème sur l'addiction et chronique saisissante d'une cuisine vue de l'intérieur, Le plongeur est un magnifique coup d'envoi, à l'hyperréalisme documentaire, héritier du Joueur de Dostoïevski, de L'homme au bras d'or de Nelson Algren et du premier récit d'Orwell, celui d'un plongeur dans le Paris des années vingt. -
La version qui n'interesse personne
Emmanuelle Pierrot
- Le Quartanier
- Série QR
- 12 Septembre 2023
- 9782896986347
Elle croyait qu'ici, à l'autre bout du monde, au confluent de la rivière Klondike et du fleuve Yukon, elle aurait le droit de vivre libre. De coucher avec qui elle veut, d'aimer qui elle veut, à visage découvert et sans honte. Mais la femme sans honte se déshonore - et contre la femme sans honneur, tous les coups sont permis.
À dix-huit ans, Sacha et son meilleur ami Tom quittent Montréal sur le pouce et aboutissent à Dawson City, au Yukon, où ils trouvent enfin la communauté de punks, d'anars et de vagabonds dont ils rêvaient. Ils adoptent une chienne-louve, Luna, et s'installent sur la Sixième Avenue, dans une cabane sans électricité ni eau courante. De jobs d'été en hivers chômés, de nuits blanches en road trips, d'amantes en amants, des années joyeuses passent dans un monde immense. Mais quand Sacha tombe amoureuse d'un autre, Tom se sent trahi : Sacha n'est qu'une pute, une profiteuse qui mérite d'être punie. Il répand son fiel ; le village choisit son camp. Puis la pandémie frappe. En quarantaine dans une cabane isolée, seule avec un coloc dont elle doit repousser les avances pressantes, Sacha compte les jours, tandis que les Dawsonites confinés font son procès.
La version qui n'intéresse personne, c'est l'histoire inouïe et cruelle d'une victime imparfaite qui, comme si c'était tout naturel, deviendra l'accusée. C'est le cri d'impuissance et de rage qu'elle adresse à celles et ceux qu'elle voyait comme son unique famille, afin que son humanité lui soit rendue. C'est son ultime tentative d'être comprise, crue, aimée. Avec ce premier roman déchirant et subversif, Emmanuelle Pierrot porte un regard radicalement lucide sur les forces qui poussent les groupes d'humains à commettre des actes terribles en restant convaincus d'exercer la justice. -
C'est l'histoire d'un voyage scolaire dans la forêt. C'est une classe d'enfants entre six et sept ans qui s'y retrouvent seuls. C'est l'âge où l'on n'est pas certain que les monstres n'existent pas, où l'imagination transforme le grincement des arbres en rugissements de bêtes sauvages. C'est une histoire qui a été mille fois racontée, mais qui ne l'a jamais été vraiment, jamais jusqu'au bout. C'est ce qui se passe après la fin des contes, quand les enfants sont perdus et qu'il est admis qu'ils n'en réchapperont pas. Que se passe-t-il dans ces instants-là? Qu'advient-il quand les règles et les lois humaines sont oubliées ou pas encore apprises? Qui aidera son prochain? Qui réglera ses comptes? À quelle distance un enfant de six ans se tient-il de la barbarie?
Dans les forêts du Morvan, il n'est aujourd'hui presque plus possible de se perdre, et pourtant des événements inconcevables se produisent chaque jour. C'est l'histoire d'un événement inconcevable. C'est l'histoire d'une excursion qui vire à l'atrocité, comme si tous gagnaient le même jour à une funeste loterie.
Les bernaches nonnettes pondent leurs oeufs sur des falaises abruptes. Quand ils naissent, les oisillons doivent se jeter dans le vide, avant même de savoir voler, afin de rejoindre leurs parents plusieurs dizaines de mètres plus bas. C'est la violence d'un rite initiatique naturel. Certains se fracassent mortellement contre les rochers, d'autres survivent.
Tous apprennent, dans la douleur, les lois du ciel. -
Il y a quelques années, les laboratoires de Renault-PSA dévoilaient la BlackJag, une voiture révolutionnaire, entièrement organique et vivante, résultat d'années de recherches croisant plusieurs disciplines scientifiques. Aujourd'hui, le professeur Fransen, l'ingénieur généticien à la tête du projet, voit revenir l'un des tout premiers modèles, le prototype, envoyé par la police pour interrogation. Pendant dix ans, c'est ce modèle qui a servi aux démonstrations devant public partout dans le monde, avant d'être mis en vente. Or son propriétaire, Antoine Donnat, vient de disparaître, et la BlackJag est la dernière à l'avoir vu. Sous la supervision de l'huissier Klein, Fransen va interroger la mémoire synthétique de la voiture pour essayer de reconstituer les événements des derniers mois. C'est la BlackJag qui parle, témoin direct du quotidien de la famille Donnat, c'est elle qui au fil des enregistrements raconte son histoire.
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Cloîtré dans son appartement, Loïc scrute la place carrée par la lunette de sa carabine .22 Long Rifle.
Quand la France s'est déconfinée, en mai 2020, Loïc a eu peur - du virus, du vaccin, des autres. Un an plus tard, il n'est toujours pas sorti. Épiant la vie du quartier, il rumine sa détresse et maudit ses anciens camarades de théâtre. Heureusement, l'écriture de sa pièce, Les aventures de Clic et Cloque, l'aide à canaliser ses angoisses. Jusqu'à quand ?
Huis clos solitaire halluciné, Jour encore, nuit à nouveau est un thriller psychogique au suspens insidieux, où se dessine une certaine France contemporaine: paranoïaque, délaissée, désinformée, excédée, sans plus aucun repère.
Ce troisième volet des Chroniques de la place carrée, qui évoque à la fois Taxi Driver et une version maniaque de Fenêtre sur cour, poursuit l'entreprise noire de Tristan Saule, à mi-chemin entre The Wire et les Rougon-Macquart. -
Alain épouse Virginie en la crypte de l'oratoire Saint-Joseph du Mont-Royal. En apparence, ce sera le plus beau jour de sa vie - de leur vie. Tout le monde est là, les parents de la mariée, la grande amie, les parents du narrateur - Libanais d'Égypte immigrés au Québec il y a trente ans, divorcés depuis vingt, qui ne se parlent plus depuis dix. Mais, à l'approche de la célébration, Alain va plus mal que jamais. Les insomnies sont de retour, l'angoisse et la maladie aussi. Et aujourd'hui, son cousin Édouard, son garçon d'honneur, son frère, perd pied, emporté par la mécanique folle d'un déni aux proportions bibliques.
Alain prie pour que le sort les épargne, pour que ce grand jour en soit un de fête et de guérison. Or un nom resurgit au détour d'une phrase, un nom maudit remonté du fond de sa mémoire, là où gisent la honte et la douleur des années sombres, un nom que rejoignent bientôt une voix, un corps, une histoire. Un fantôme se fait chair, qui a plusieurs visages. Et tout ce qu'on a voulu oublier, tout ce qu'on a refusé de voir, tout ce qu'on a détesté vient réclamer son dû.
Comme on fait son lit on se couche. Car la vie, ya Alain, est un piège qui sommeille dans la prison du temps. Oui, la vie, ya ebni, souviens-t'en, ne dure pas: quelques joies, de grandes peines, mille secrets, mille dangers. -
La déesse des mouches à feu, c'est Catherine, quatorze ans, l'adolescence allée chez le diable. C'est l'année noire de toutes les premières fois. C'est 1996 à Chicoutimi-Nord, le punk rock, le fantôme de Kurt Cobain et les cheveux de Mia Wallace. Des petites crisses qui trippent sur Christiane F. et des gars beaux comme dans les films en noir et blanc. Le flânage au terminus et les batailles de skateux contre pouilleux en arrière du centre d'achats. L'hiver au campe dans le fin fond du bois, les plombs aux couteaux, le PCP vert et les baises floues au milieu des sacs de couchage. C'est aussi les parents à bout de souffle et les amants qui se font la guerre. Un jeep qui s'écrase dans un chêne centenaire, les eaux du déluge qui emportent la moitié d'une ville et des oiseaux perdus qu'on essaie de tuer en criant.
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La fractale Baudelaire
Lisa Robertson, Jeannot Clair
- Le Quartanier
- Série QR
- 7 Avril 2023
- 9782896986453
Dans une chambre d'hôtel, Hazel Brown découvre au réveil qu'elle a écrit l'oeuvre entier de Baudelaire. Sous le choc de cette révélation, elle replonge dans sa mémoire de fille et raconte l'époque où, poète sans le sou, elle vivait en dandy dans le Paris des années 1980 : les chambres miteuses et les garçons maigres, les gages de domestique et les fripes griffées. Si elle est sûre de sa vocation, la jeune Hazel se débat avec ses désirs. Comment incarner une autre féminité que celle, réifiée, que lui renvoient ses amants et ses employeurs, comme la littérature elle-même ?
La fractale Baudelaire est un roman d'apprentissage et un art poétique, autant qu'un voyage dans les méandres du souvenir et une somptueuse méditation sur les vête-ments, la ville, la peinture et la figure de la jeune fille. -
La vie virée vraie est un livre de poèmes minimaux, réduits à l'os. C'est un petit livre très rapide qui cherche à dire l'expérience entière et vertigineuse d'une vie de trente-six ans. Un livre où se rejouent l'enfance, la relation au père, au genre et au sexe, et que parcourt une animalité furtive, insistante - antilope, hirondelle, serpent, crabe, poney. La vie virée vraie embrasse le mouvement de la conscience qui se découvre consciente d'elle-même, pesante, angoissée, désirante, nostalgique d'une certaine sauvagerie - la bête, toujours la bête.
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Envies puise à la violence qui dresse les femmes contre elles-mêmes et les unes contre les autres. On y lit des poèmes fielleux et tendres, cyniques et affligés, qui racontent des existences inaperçues, éclipsées par la superbe de celles qui ont tout. Isolées, produits d'un contexte qui les dépasse, agitées par un désir vorace, les femmes d'Envies se sabotent, pleurent et se vengent, pensant à voix haute ce que tant d'autres disent tout bas.
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Quand j'ai emménagé coin Cuvillier et Sainte-Catherine, dans Hochelaga, je pensais avoir tout gâché, tout perdu. Autour de mon appartement, il y avait les ouvrières et les enfants d'autrefois, il y avait les filles de la rue, leur présence comme une menace, mais aussi un mystère, un espoir. Un jour je descendrais les rejoindre, pour de bon.
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Patrice Favre a suivi les traces de son père magistrat. Sorti d'école, il est nommé temporairement juge d'instruction en banlieue parisienne - une banlieue lointaine, mi-réelle mi-fantomatique. On observe les débuts de Favre, ses premières audiences au Palais de justice, ses investigations dans le cas criminel dont il a hérité : le meurtre d'un détenu emprisonné pour crime sexuel. Son prédécesseur - Herzog, un magistrat décati, énigmatique, en tout cas plus expérimenté - s'y est épuisé avant de se donner la mort.
Au fil de son enquête, où il progresse pour l'essentiel en reprenant l'instruction qu'a menée Herzog, Favre est renvoyé à ses dilemmes, à ses choix de vie, à sa propre histoire familiale et au récit national trouble, à toute la comédie sociale qu'il faut jouer pour tenir le rang dans son milieu et son métier.
Roman empruntant parfois au documentaire, L'instruction questionne avec inquiétude la société française contemporaine à travers le prisme techno-cratique, judiciaire, carcéral et policier. C'est une manière d'anti-polar où l'enquête consiste surtout dans la recherche existentielle, voire métaphysique, d'une solution au malaise croissant de l'enquêteur. -
Un garçon se suicide dans un terrain vague d'Hochelaga-Maisonneuve où souvent il passait la journée étendu au soleil et la nuit à faire des feux. Il s'est levé un matin d'août et s'est pendu à un arbre. Des amis lui survivent. Ils portent sa mémoire et continuent à vivre, à lutter, à aimer, confrontant les amours du présent à ceux du souvenir. Ils racontent les erreurs, les amis perdus, les peurs, les quelques victoires et les explosions de révolte.
Il y a les enfances isolées, les hommes violents, la dépression, les années d'humiliation, d'insatisfaction à trop travailler pour trop peu. Il y a les chicanes et les ruptures, entre amis, entre femmes. Mais il y a la vie qui surgit aux endroits les plus inattendus, l'amour encore, la beauté et l'espoir. Et il y a le jeu - le jeu des histoires, le jeu de la musique, et tous ces moments où nous sommes enfin réunis.
Depuis l'enfance dans l'Ontario français jusqu'aux squats punks de Californie, en passant par le Montréal des années 2010 tel que vécu par un groupe d'amis composé de militants, de marginaux, de féministes, d'étudiants et de chômeurs qui rêvent d'écrire, Le jeu de la musique est un appel, une ode à la vie et à l'amitié, adressée à celles et à ceux qui ressentent toute la violence du monde, au point parfois d'avoir envie de mourir. -
Avant la guerre, Carel Ender habite à Privine. Il est fonctionnaire de l'administration impériale. C'est toujours mieux que ce qu'en attendait sa famille.
Ses amis se nomment Isabelle Van Duyck, fondatrice d'une résidence utopique; Jean Faber, militant politique de gauche; Nina Fischer, journaliste de renom donnant de son temps au Secours des réfugiés; Ilya Rehberg, jeune dramaturge intéressé par la « question kadienne »...
Puis la grande histoire tombe sur Privine, et efface le souvenir de cette communauté.
Des années plus tard, l'historienne Sabine Oloron rencontrera le nom de Carel Ender dans ses recherches. Peut-être saura-t-elle dire la morale de cette fable. -
Une boîte de carton, une cassette, un téléphone, une radio. Le décor est dépouillé. Le corps est en convalescence, improductif, à l'écart du monde. Du fond de la pièce s'échappent des murmures, bientôt des phrases. Ce ne sont pas des gens. Ce sont des voix à la radio. Pendant des jours, des mois, des années, ces voix trompent la solitude et la douleur.
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Quand Gabriel Rivages raconte la vie de Johnny Weissmuller (1904-1984), c'est tout le patchwork américain qui s'anime, des exploits sportifs à l'underground littéraire, de la gloire cinématographique aux déclins obscurs. Burroughs vend des taille-crayons, Einstein croise un chasseur d'écureuils, on joue au golf à Cuba, JFK est devenu un aéroport, le record du monde du 100 mètres nage libre est brisé, Tarzan sauve Jane, un comptable véreux s'enfuit avec la caisse, la Seconde Guerre mondiale fait des vagues sur le lac Michigan et un mythe vivant finit placier dans un restaurant de Las Vegas.Hongrie-Hollywood Express est le premier roman de la trilogie 1984. Les deuxième et troisième volumes, Mayonnaise et Pomme S, mettront en scène l'écrivain Richard Brautigan et Steve Jobs, l'homme d'Apple.
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Ce livre s'appelle Ouvrir son coeur. Le sujet de ce livre, c'est la honte. Ce livre raconte ma vie, des morceaux de ma vie. Il raconte la solitude d'une enfant, l'école peuplée de camarades qui savaient, eux, comment être des enfants, comment être un groupe, alors que je ne savais pas. Il raconte l'histoire de mon oeil. Il raconte les chirurgies, la peur, et l'amitié fusionnelle et jalouse avec une petite fille lumineuse, que la mort guettait. Il raconte une adolescence atrabilaire et secrète. Il raconte une petite ville industrielle, son usine immense et inhumaine, aux allures de vaisseau générationnel, et l'été de terreur et d'hébétude que j'y ai vécu, avant ma fuite à Montréal, qui n'arrangera rien. En racontant, j'essaie de comprendre comment les souvenirs deviennent des souvenirs, les personnes des personnes, les livres des livres. L'instant présent est inconnaissable et le passé est perdu. Les souvenirs, les livres, les personnes se construisent en se racontant. En se racontant, ils se transforment. Rien n'est jamais fixé. Au bout de cette histoire se trouve la mort. Ce livre s'appelle Ouvrir son coeur. Le sujet de ce livre, c'est la mort. - Alexie Morin