La démocratie est aujourd'hui une aspiration pour des centaines de millions de personnes, comme elle est un droit de naissance pour des millions d'autres à travers le monde. Mais de quelle démocratie parlons-nous ? Sa signification est-elle inchangée depuis sa création dans la Grèce antique ? Examinant ses différentes manifestations et montrant comment la démocratie a changé au cours de sa longue vie, depuis les temps anciens jusqu'à nos jours, Paul Cartledge offre une réflexion d'une fécondité exceptionnelle. Comment le « pouvoir du peuple » des Athéniens a-t-il émergé en premier lieu ? Et en quoi la version athénienne de la démocratie différait-elle des nombreuses autres formes qui se sont développées ensuite ? Après un âge d'or au IVe siècle av. J.-C., il y a eu une longue et lente dégradation de la conception et de la pratique grecques originales de la démocratie. De l'Antiquité tardive à la Renaissance, la démocratie a été éclipsée par d'autres formes de gouvernement, tant en théorie qu'en pratique. Mais ce n'était en aucun cas la fin de l'histoire : la démocratie devait finalement connaître une nouvelle floraison. D'abord ravivée dans l'Angleterre du XVIIe siècle, elle devait renaître dans le climat révolutionnaire de l'Amérique du Nord et de la France à la fin du XVIIIe siècle - et n'a cessé de se reconstituer et de se réinventer depuis, jusqu'à la contradiction la plus récente de la « démocratie illibérale ».
Importance des minorités pour faire société, émancipation des femmes, critique de la propriété privée et de la domination sous toutes ses formes - Emma Goldman, grande figure du féminisme mondial et de l'anarchisme international, nous rappelle dans ce recueil qu'on ne doit pas transiger, jamais, avec l'égalité et la liberté.
Une synthèse novatrice et référente.Qu'est-ce que le fascisme ? Cette question ne cesse de se poser aux historiens avec la même force qu'aux contemporains de Mussolini. Fut-il un mouvement réactionnaire, conservateur ou révolutionnaire ? Se situait-il à gauche ou à droite ? Autre question cruciale : quelle place y occupa le Duce, et peut-on réduire le fascisme à un simple " mussolinisme " ?
Le présent ouvrage apporte des réponses à ces questions tout en jetant sur le fascisme un regard nouveau et rare chez les historiens français. Réaffirmant avec force le caractère totalitaire du régime, il replace son idéologie dans sa nature révolutionnaire qui le rattache à la pensée anthropologique des Lumières et notamment de Rousseau, à la Révolution française et au socialisme. Si les fascistes cherchèrent à détruire par la violence la modernité libérale de leur temps, ce ne fut pas au nom d'un âge d'or révolu et dans une démarche passéiste, mais bien avec la volonté farouche de construire une société et un homme nouveaux.
L'histoire que l'auteur raconte avec brio des origines à sa fin, apparaît
in fine comme celle d'une révolution avortée.
Texte intégral révisé suivi d'une biographie d'Élisée Reclus. Grand voyageur ami d'Alexandra David-Neel, éminent géographe auteur d'une Nouvelle géographie universelle en 19 volumes, écologiste et féministe avant l'heure, Élisée Reclus est aussi, avec ses amis Mikhaïl Bakounine et Pierre Kropotkine, l'un des grands penseurs de l'Anarchisme. Convaincu que l'anarchie est la plus haute expression de l'ordre, il ne cessera de propager cet Idéal toute sa vie, malgré ses années de prison et d'exil dûes à son engagement contre le régime de Napoléon III et à sa participation active à l'insurrection de la Commune. En juin 1894, alors que les milieux anarchistes subissent une sévère répression à la suite d'une vague d'attentats, il prononce une conférence à Bruxelles, devant les membres de la loge maçonnique Les Amis philanthropes. Loin de prôner la violence révolutionnaire, mais sans non plus dénoncer les poseurs de bombes, l'auteur expose magistralement ses théories sur l'Anarchie, resituant celle-ci dans une longue tradition de contestation de l'autorité et la posant comme une nécessité historique. Selon lui, de la Préhistoire à Proudhon en passant par la Grèce antique, la Renaissance et les Lumières, l'Anarchie est aussi ancienne que le pouvoir avec ses promesses de bonheur des peuples et sa morale fondée sur le tremblement religieux. Reclus démontre qu'elle n'est en rien une chimère d'énergumènes mais un mouvement inéluctable de la société dans son ensemble, et se réjouit de constater les signes de cette évolution: la mort de Dieu, l'irrespect croissant envers l'Etat, le développement de communautés libertaires, relevant que la science elle-même est anarchiste dans son principe. Le système actuel fondé sur le pouvoir et l'autorité étant intenable, Élisée Reclus est convaincu que le jour de l'Anarchie viendra.
Le capitalisme détruit les existences. Il les détruit même deux fois. D'abord d'angoisse et de précarité en remettant la survie matérielle des individus aux mains de deux maîtres fous : le « marché » et l'« emploi ». Ensuite en rendant la planète inhabitable : surchauffée, asphyxiante, et désormais pandémique. Il faut regarder ces faits bien en face et s'astreindre maintenant à un exercice de conséquence. 1/ Le capitalisme met en péril l'espèce humaine. 2/ En 40 ans de néolibéralisme, l'espace social-démocrate où se négociaient des « aménagements » dans le capitalisme a été fermé : ne reste plus que l'alternative de l'aggravation ou du renversement. 3/ Il ne faut pas douter que la minorité qui en tire avantage soit prête à tout pour se maintenir. 4/ Sortir du capitalisme a un nom : communisme.
Mais sortir du capitalisme demeure un impensable tant que le communisme demeure un infigurable. Car le communisme ne peut pas être désirable seulement de ce que le capitalisme devient odieux. Il doit l'être pour lui-même. Or, pour l'être, il doit se donner à voir, à imaginer : bref se donner des figures.
La fatalité historique du communisme est de n'avoir jamais eu lieu et pourtant d'avoir été grevé d'images désastreuses. À la place desquelles il faut mettre enfin des images de ce qu'il pourrait être lui, réellement.
«Les victoires démocratiques restent toujours imparfaites et provisoires, et c'est leur force que de rappeler combien l'histoire est incertaine, l'humanité fragile.»
Vincent Duclert
Face à tant d'impuissance pour agir et penser aujourd'hui face à l'antisémitisme, il n'est pas vain de rappeler à la France, à l'Europe, le meilleur de ce qu'elles ont été dans le passé, afin de demeurer capables encore d'édifier des sociétés démocratiques. Ces récits de combats héroïques réinsufflent à la raison démocratique un supplément d'âme. Il ne suffit pas d'invoquer la démocratie pour la défendre. On doit "croire" en elle et trouver, dans cette croyance de raison, le courage de se battre pour elle.
En 1910, Charles Péguy écrit dans Notre jeunesse que l'affaire Dreyfus «ne finira jamais». Plus elle est finie, explique-t-il, «plus elle prouve».
Philosophe russe, révolutionnaire et théoricien de l'anarchisme, Mikhaïl Aleksandrovitch Bakounine s'oppose dès 18 ans aux institutions, abandonnant une carrière militaire et refusant de devenir fonctionnaire. Étudiant et traducteur, il parcourt l'Europe et bouscule par ses écrits l'ordre établi. Citations : "Amoureux et jaloux de la liberté humaine, et la considérant comme la condition absolue de tout ce que nous adorons et respectons dans l'humanité, je retourne la phrase de Voltaire, et je dis : Si Dieu existait réellement, il faudrait le faire disparaître." - "L'enfant n'appartient ni à sa famille, ni à la société, mais à sa future liberté."
Comment la dette de l'État s'est-elle installée au centre de la scène politique, au point d'y devenir omniprésente ? Ce livre original constitue la première enquête historique et sociologique sur les modalités concrètes qui ont peu à peu arrimé les comptes de la puissance publique aux intérêts privés de la finance. Une histoire de la dette méconnue et passionnante, qui offre une clé de lecture incomparable pour comprendre notre présent, tant français qu'européen. À échéances régulières, la question de la dette publique revient coloniser l'espace public. Faire la preuve incessante du crédit de l'État auprès des marchés financiers constitue un droit d'entrée dans le champ des propositions politiques. Mais des alternatives ont existé au cours desquelles la puissance publique gouvernait la finance, plutôt que l'inverse, et organisait l'allocation du crédit et de la monnaie.
À rebours de ceux qui voient la dette comme une loi d'airain quasi naturelle, ce livre reconstitue la généalogie détaillée de ce choix stratégique d'enfermement du financement du Trésor dans les marchés de capitaux. Il montre ainsi à quel point l'ordre de la dette est organisé par des hommes politiques, des hauts fonctionnaires et des banquiers, de gauche comme de droite, transformant l'État en un acteur de marché comme les autres, qui crée et vend ses produits de dette, construisant par là sa propre prison.
Une fissure s'est ouverte, depuis une cinquantaine d'années, entre juge et démocratie représentative. La montée en puissance du premier anémie la seconde.
L'emprise du juge sur la démocratie revêt deux aspects distincts : le droit se construit désormais en dehors de la loi, voire contre elle ; la pénalisation de la vie publique est croissante. Ces deux aspects sont liés car ils conduisent tous deux à la dégradation de la figure du Représentant : le premier en restreignant toujours davantage son champ d'action ; le second en en faisant un perpétuel suspect.
Le mal qui ronge aujourd'hui la démocratie paraît se situer beaucoup plus là - c'est-à-dire dans l'abaissement du Représentant, dans le rétrécissement de la souveraineté du peuple, dans la rétraction de l'autorité publique - que dans les réactions allergiques que provoque cet affaiblissement de l'État : abstention, populisme, illibéralisme.
Cet ascendant croissant du pouvoir juridictionnel sur les autres a-t-il amené davantage de rigueur et de transparence dans le fonctionnement démocratique ? Il se découvre chaque jour un peu plus qu'il n'a fait que remplacer le caprice du prince par le caprice du juge. D'où la question : que faire pour restaurer une juste séparation des pouvoirs ?
Voici le premier récit complet de la plus grande aventure politique du XXè siècle : celle qui a porté les plus folles espérances et qui a conduit à la plus terrible catastrophe humaine de tous les temps, par sa durée et son ampleur.
Le communisme n'a pas seulement régné sur une trentaine de pays et régi la vie de plus d'un tiers de l'humanité, il a également occupé la plupart des esprits pendant des décennies, aux quatre coins du monde. Nulle autre idéologie, nul autre système politique n'ont connu dans l'histoire une si foudroyante expansion.
Comment expliquer ce succès, à quoi correspond-t-il, de quelle manière le communisme a-t-il triomphé, pourquoi a-t-il partout échoué, pour quelles raisons tant de vie humaines ont-elles été sacrifiées en son nom ? Seule une histoire mondiale de cette épopée permet de répondre à ces questions, de comprendre à la fois ce siècle communiste et l'héritage qu'il nous a laissé.
D'octobre 1917 à la Révolution culturelle chinoise, de la collectivisation des campagnes à l'industrialisation menée à marche forcée, de la pénurie généralisée à la culture bâillonnée, de l'enfermement des peuples aux camps de concentration, tous les aspects de la réalité communiste, de son vécu sont ici racontés, analysés, mis en perspective.
La trilogie, saluée par la critique et les plus grands spécialistes, fait déjà date dans l'historiographie du communisme et a été couronnée par le prix Jan Michalski. Le tome 3 est aussi le lauréat du Prix Aujourd'hui 2018.
La tragédie humaine à laquelle est associée l'histoire du communisme est-elle la conséquence de circonstances malheureuses ou d'une politique délibérée ? Ce débat, récurrent depuis l'apparition du premier régime communiste en Russie, ne peut être tranché que si l'on prend en considération la dimension mondiale du système.
Quelles que soient la géographie, l'histoire, la culture des pays où le communisme a triomphé, les mêmes méthodes ont abouti aux mêmes résultats. Ce ne sont pas les circonstances qui ont scellé le sort des peuples concernés, mais l'application d'une politique identique, quelles que soient les particularités nationales. Rien ne ressemble davantage à une victime russe qu'une victime chinoise, cubaine, coréenne ou roumaine...
La guerre civile permanente que les régimes communistes ont menée contre leur population, pour imposer leur dogme, explique l'hécatombe sans précédent qui en a résulté. C'est en toute conscience que des dizaines de millions d'êtres humains ont été enfermés, torturés, déportés, affamés. C'est en toute conscience que des centaines de millions d'autres êtres humains ont été surveillés, exploités, endoctrinés, asservis.
L'histoire mondiale du communisme, vue du côté des victimes, montre à quel point les utopistes parvenus au pouvoir n'ont pas davantage cherché à en finir avec les inégalités qu' à construire la société idéale promise : c'est à l'humanité de l'homme qu'ils s'en sont pris.
La trilogie, saluée par la critique et les plus grands spécialistes, fait déjà date dans l'historiographie du communisme et a été couronnée par le prix Jan Michalski. Le tome 3 est aussi le lauréat du Prix Aujourd'hui 2018.
Après Les Bourreaux (tome 1, le communisme d'en haut, du côté du pouvoir) et Les Victimes (tome 2, le communisme d'en bas, du côté de la société), Thierry Wolton achève sa monumentale trilogie « Une histoire mondiale du communisme » par ce dernier volume : Les Complices (le communisme dans les têtes).
L'auteur s'attache, dans ce volet de son essai d'investigation historique, à tous ceux qui ont permis au communisme de prospérer avec un tel succès dans l'espace et avec une telle longévité dans le temps.
Les dizaines de PC dans le monde avec leurs millions d'adhérents ; l'aveuglement idéologique de la quasi-totalité des intellectuels de l'époque ; la complaisance de la plupart des responsables politiques occidentaux à l'égard des régimes marxistes-léninistes ; l'aide apportée par les capitalistes cupides aux économies socialistes : autant de visages et de formes de complicité.
A l'heure du bilan, maintenant qu'il est établi que l'espoir s'est mué en tragédie, les responsabilités apparaissent multiples et planétaires, ce qui rend ce passé si douloureux et la volonté de l'oublier impérieuse. Regarder ces vérités en face, sans honte mais sans concession, est pourtant une nécessité si l'on veut comprendre notre époque, héritage direct de ce siècle communiste achevé.
Fidèle à sa méthode, Thierry Wolton brosse ici un grand récit ponctué de témoignages, d'anecdotes, d'analyses qui viennent compléter sa réflexion. Il montre aussi combien cette aventure humaine a façonné le visage de notre nouveau siècle, faisant de cette Histoire mondiale du communisme un livre au présent.
Sa trilogie, saluée par la critique et les plus grands spécialistes, fait déjà date dans l'historiographie du communisme et a été couronnée par le prix Jan Michalski. Le tome 3 est aussi le lauréat du Prix Aujourd'hui 2018.
Les dénonciations inquiètes du populisme sont monnaie courante depuis longtemps. Mais elles ont tourné à la panique générale lorsque le populisme a été perçu comme l'arme secrète derrière l'improbable candidature présidentielle du milliardaire télégénique Donald Trump. Le populisme passait aussi pour la mystérieuse force expliquant les succès d'audience de Bernie Sanders ou d'autres leaders de gauche. « Populisme » était également le nom du délire collectif qui avait infligé le Brexit au Royaume-Uni. En fait, dès qu'on prenait la peine de regarder, on voyait un peu partout dans le monde les classes dirigeantes se faire étriller par des trublions sans qualification. Les populistes trompaient les gens sur la mondialisation. Les populistes disaient du mal des élites. Les populistes bouleversaient les institutions politiques traditionnelles. Et les démocraties prenaient fin parce qu'elles étaient trop démocratiques. Il était temps pour les élites de se lever contre les masses ignorantes...
Reprenant plus d'un siècle d'histoire du populisme et de l'antipopulisme, Thomas Frank montre ce que cette opposition révèle : la défiance des classes cultivées pour la démocratie dès lors qu'elle ne fait plus barrage à l'expression des intérêts d'un peuple qui ne reste pas à sa place.
Journaliste et essayiste, Thomas Frank écrit régulièrement pour Le Monde diplomatique et Harper's des articles d'analyse sociale et politique de la situation américaine. Cofondateur et rédacteur en chef du magazine The Baffler, il est l'auteur d'une demi-douzaine d'ouvrages, dont, aux éditions Agone Pourquoi les riches votent à gauche, Pourquoi les pauvres votent à droite et Le Marché de droit divin.
May Picqueray (1898-1983) n'a loupé aucun des grands rendez-vous de l'histoire du XXe siècle. Dès 1921, elle proteste contre la condamnation à mort de Sacco et Vanzetti. En novembre 1922 elle est mandatée au congrès de l'Internationale syndicale rouge, à Moscou. Elle monte sur la table pour dénoncer un congrès en train de se goberger pendant que les ouvriers russes crèvent de faim, chante Le Triomphe de l'anarchie et refuse de serrer la main de Trotski. Pendant la guerre, elle fabrique des faux papiers. Puis s'investit dans les mobilisations de mai 1968, du Larzac, de Creys-Malville, oeuvre en faveur des objecteurs de conscience. Rien ne prédisposait cette petite Bretonne ayant commencé à travailler à 11 ans à côtoyer Nestor Makhno, Emma Goldman, Alexandre Berkman, Marius Jacob, Durruti...
May Picqueray (1898-1983) fut l'une des grandes figures féminines du mouvement libertaire français du XXe siècle.
« Par quelle aberration peut-on penser que la politique consiste à désigner des ennemis alors qu'elle est la définition d'un partage : ce que nous avons en commun, nous individus, à l'intérieur d'une société et comment nous devons l'organiser ? » Fabrice Humbert
Les mots ne se contentent pas de décrire la réalité, ils la créent. En hystérisant le débat, en jouant la fureur, l'outrance, la polémique, bref en agitant de tous côtés le fanion rouge du scandale, tous les rhéteurs de l'excès abîment la démocratie et engendrent un état incertain où tout est possible. Ce n'est pas seulement la réalité de la situation qui provoque le malaise actuel, c'est sa déformation par les mots. L'expression lucide et mesurée d'une situation reste en démocratie le meilleur moyen d'affronter les problèmes. D'où nos difficultés si ce débat même est altéré, si la réalité est déjà déformée par les représentations hérissées et délirantes des polémistes. Notre tâche, c'est d'affronter les difficultés réelles, pas les délires.
Nos régimes sont dits démocratiques parce qu'ils sont consacrés par les urnes. Mais nous ne sommes pas gouvernés démocratiquement, car l'action des gouvernements n'obéit pas à des règles de transparence, d'exercice de la responsabilité, de réactivité ou d'écoute des citoyens clairement établies. D'où la spécificité du désarroi et de la colère de nos contemporains.
À l'âge d'une présidentialisation caractérisée par la concentration des pouvoirs entre les mains de l'exécutif, Pierre Rosanvallon montre que le problème n'est plus seulement celui de la " crise de la représentation ". Il est devenu celui du mal-gouvernement. Or la théorie de la démocratie a jusqu'à présent fait l'impasse sur cette question des rapports entre gouvernés et gouvernants en se limitant à penser la représentation et l'élection. Il est donc urgent d'aller aujourd'hui plus loin pour comprendre les mécanismes de ce mal-gouvernement et déterminer les conditions d'une nouvelle révolution démocratique à accomplir.
Ce livre propose d'ordonner les aspirations et les réflexions qui s'expriment aujourd'hui dans de nombreux secteurs de la société civile et dans le monde militant autour de ces questions en distinguant les qualités requises des gouvernants et les règles organisatrices de la relation entre gouvernés et gouvernants. Réunies, celles-ci forment les principes d'une démocratie d'exercice comme bon gouvernement.
Pierre Rosanvallon est professeur au Collège de France. Il anime également La République des Idées et le projet Raconter la vie. Après La Contre-démocratie, La Légitimité démocratique et La Société des égaux, Le Bon Gouvernement constitue le quatrième volet de son enquête sur la mutation des démocraties contemporaines.
Le boulangisme naît de la rencontre entre la droite monarchiste et l'extrême gauche radicale, unies derrière un général puis ministre rendu populaire par sa démagogie pittoresque, Georges Boulanger. Ce mouvement hétérogène et populiste, protestataire et antiparlementaire, menace sérieusement la Troisième République avant de s'effondrer.
Cette période agitée de la fin du XIXe siècle présente d'étranges ressemblances avec la nôtre : une situation de grande défiance de la base envers les élites, une conjoncture économique incertaine, une vive contestation du système dominant par ses exclus, des partis politiques divisés et paraissant impuissants. Le boulangisme lui-même s'avère plein d'enseignements sur l'efficacité de la démagogie, le pouvoir pervers de la communication politique quand la forme efface le fond, l'ascension aberrante d'un individu sans principes poussé par un clan d'arrivistes, le rôle ravageur de l'argent dans la politique et l'effet aveuglant de la haine pour un homme (Jules Ferry en l'occurrence), la puissance des médias, les alliances de fait entre opposants qui se détestent, enfin la faiblesse de la démocratie face à ses adversaires.
Bertrand Joly reconsidère dans cette enquête magistrale et monumentale la question très controversée de l'identité du boulangisme, bonapartiste pour les uns, préfasciste pour d'autres, et peut-être plus que tout cela. Un premier populisme nationaliste ?
L'anarchisme demeure un mouvement largement méconnu, pourtant riche de théories et d'expériences qui ont marqué, souvent dans l'ombre, les deux derniers siècles.
Né en Europe lors de la révolution industrielle, il se forme en réaction à la condition prolétarienne et à l'autorité de l'État. Si l'anarchisme naît d'une négation radicale de tout ce qui diminue ou asservit l'homme, il est aussi porteur d'un projet fondé sur l'égalité, la liberté et l'autonomie. Les courants multiples qui nourrissent l'idée anarchiste se retrouvent ainsi unis dans des combats (contre les totalitarismes, le colonialisme, le capitalisme...) menés de concert avec des pratiques grosses de la société future (syndicalisme, écoles, fédéralisme, communes libres...).
Éclipsé un temps par l'hégémonie marxiste, le projet libertaire renaît aujourd'hui, ouvrant de nouvelles perspectives d'émancipation empreintes d'expériences passées toujours vivantes.
Qu'est-ce que le socialisme ? Une politique, mais
fondée sur une philosophie, et sur le coeur de la vie
humaine. C'est ce que Jaurès, homme politique, mais
aussi philosophe, démontre dans ces deux inédits
essentiels. Le socialisme consiste à justifier l'intervention
de la société dans la vie humaine, les « relations de
travail ». Mais il le fait pour réaliser la liberté individuelle
et les principes universels, dans le monde concret et
vivant. Revenir à l'origine du socialisme pour résister à
la « fin de l'histoire », tel est le programme de ce livre.
Ce n'est pas un hasard si ces deux textes précèdent
le retour de Jaurès en politique en tant que député
de Carmaux. Jaurès se confronte au réel, à la fois
en philosophe et en citoyen. Pour lui, la liberté et la
justice sont indispensables pour sauver la politique et
l'humanité. Quoi de plus actuel ? Ces textes, qui forment
une véritable leçon de philosophie, aident à penser le
socialisme et notre temps.
Frédéric Worms, professeur de philosophie à l'ENS,
travaille sur le vivant et la politique de Jaurès et Bergson
à aujourd'hui.
Gilles Candar, président de la Société d'études
jaurésiennes, est responsable de l'édition des OEuvres de
Jean Jaurès aux éditions Fayard.
Élisée Reclus fut d'abord un grand géographe, l'un des plus éminents de son temps. Il fut également anarchiste. Il le proclama urbi et urbi. Ce qui lui valut divers inconvénients, dont la prison et le bannissement (il mourra à Bruxelles). Il était géographe et anarchiste, pour les mêmes raisons. Ce qui peut paraître paradoxal. Comme Pierre Kropotkine, qu'il préfaça, son communisme libertaire se nourrit de la science. C'est l'étude rationnelle des sociétés humaines, de l'aménagement de l'espace, de la production et de la distribution des ressources qui justifie son adhésion aux idéaux anarchistes. Il est anarchiste par réalisme. Il y voit, à la fois, la conséquence nécessaire et inévitable de la révolution sociale et l'aboutissement de ses recherches sur la vie effective des hommes à la surface d'une planète qu'il parcourra inlassablement.
Hitler et Staline sont morts. Mais nous n'en avons pas fini avec le totalitarisme. C'est avec une fausse douceur et au nom d'un bonheur lobotomisé que la société mondialisée et technologisée nous soumet à l'utopie liberticide du " meilleur des mondes ". Un cri d'alarme. Un guide d'éveil. Un traité de la résistance. Les totalitarismes, dont Hannah Arendt a dévoilé la logique de terreur, auraient-ils inventé une forme de bonheur ?
L'audace de cet ouvrage est d'oser cette question. Qu'ils aient été combinés au mécanisme de l'illusion et nourris par une propagande promettant un avenir radieux ne suffit pas à expliquer la fascination, l'enthousiasme et l'obéissance qu'ont suscités les régimes hitlérien et stalinien.
Quel est en effet le plus grand paradoxe que présentent la terreur nazie ou communiste ? Que prévaut en parallèle un modèle social de promotion scolaire ou professionnelle. Qu'abondent les mécanismes de reconnaissance et de gratification. Que se déploie la protection d'un État-parti " providentiel ". Que s'éprouve au quotidien la joie d'une communauté nouvelle. Autrement dit que la terreur promet le bonheur, celui du Volk ou du Prolétariat.
Bénéficiant de la crise des années 1930, les totalitarismes ont réalisé certaines des promesses non tenues de la démocratie libérale, même si le " bonheur totalitaire " profite d'abord aux inclus de ces systèmes qui vouaient conjointement à l'enfer tous les exclus de la race ou de la classe élue.
Un essai brillant qui vient bousculer beaucoup d'idées reçues.
Prix Guerres et Paix 2022
D'où vient la crise qui paralyse lentement mais sûrement les démocraties et qui provoque en retour les sursauts populistes ? Sur la base d'études approfondies de l'opinion, Chloé Morin dégage les principaux facteurs qui ont créé cette situation. Les règles du jeu politique ont changé sans que son personnel s'en soit avisé. La défiance des citoyens envers les pouvoirs s'est installée sans que ses sources soient véritablement saisies et combattues.
Le "séparatisme" fait des ravages, mais il n'est pas seulement là où l'on croit. Il est aussi le séparatisme des élites par rapport aux peuples, ou encore le fait des tribus dont le numérique encourage la fermeture sur elles-mêmes.
Tels sont les vrais périls qu'affronte aujourd'hui la démocratie et qui soulèvent les passions populistes. Au lieu de dénoncer celles-ci comme une menace, soutient Chloé Morin, il faut savoir y lire un rappel de nos régimes à leur inspiration d'origine.
Dernier ouvrage de l'académicien Jacques Bainville publié de son vivant, ce texte paru en 1935 dresse l'histoire des dictateurs à travers les âges." La dictature n'a pas de causes uniformes. Elle peut être une réaction de défense contre l'anarchie et la ruine et contre les effets de la démocratie portée à sa dernière conséquence [...]. Elle peut être au contraire pour la démocratie égalitaire et anticapitaliste le moyen de vaincre les forces qui lui résistent et de s'imposer. Il y a donc des dictatures diverses. Il y en a pour tout le monde et un peu pour tous les goûts. Ceux qui en rejettent l'idée avec horreur s'en accommoderaient très bien et, souvent, s'y acheminent sans s'en douter. Ceux qui la désirent seraient parfois bien déçus si elle triomphait.
" Qu'on l'appelle ou qu'on la déteste, il est donc essentiel de la connaître avec les visages divers qu'elle a pris au cours de l'histoire, puis, de nos jours, dans des pays si nombreux et si éloignés les uns des autres qu'on aurait probablement tort de n'y voir qu'une sorte de vogue quand elle est l'effet d'une loi ou d'une nécessité. "
Jacques Bainville, 1935.
Une histoire globale, toujours d'actualité.
Deux textes, deux mises en gardes urgents : l'IA va-t-elle dynamiter la politique ?
Pour Laurent Alexandre les effets de l'irrésistible progression de l'IA vont tout bouleverser.
À l'origine on pensait qu'Internet deviendrait le principal outil de la promotion de la démocratie, au contraire le web est devenu un outil majeur de désinformation et de contrôle policier, allié des régimes les plus autoritaires. Le pouvoir est désormais tout entier dans une poignée de mains : Washington et ses GAFA, le parti communiste chinois et ses BATX.
Le capitalisme cognitif - c'est-à-dire l'économie de la connaissance, de l'IA et du big data va modifier radicalement la hiérarchie des nations. L'Europe est en péril, la France ne réagit pas, le politique est coupable !
Jean François Copé, dans un second texte, répond aux inquiétudes et anathèmes de Laurent Alexandre. La politique doit devenir plus importante que jamais pour réguler notre pouvoir démiurgique sur la nature et nous-même et donc décider de l'avenir de l'Humanité. Des initiatives précises sont à prendre à tous les niveaux : manipulations génétiques, sélection embryonnaire, IA, la fusion neurone - transistor... Il faut sauver la politique pour sauver l'homme.