Suite à une conversation dans un taxi new-yorkais avec un chauffeur pakistanais qui ne comprend pas qu'un pays puisse exister sans ennemis, Umberto Eco s'interroge. Après avoir constaté les ravages d'idéologies totalitaires telles que le nazisme ou le fascisme, la société actuelle ressent-elle la nécessité de se définir par rapport à un ennemi et de le diaboliser ? Les Etats renonceraient-ils, aujourd'hui, à l'opportunité de créer de nouveaux boucs émissaires pour renforcer le sentiment d'identité nationale et leur pouvoir ?Puis, à l'occasion de conférences ou d'essais à thèmes qui amusent autant celui qui parle que celui qui écoute, et qui sont, en somme, des exercices de rhétorique baroque, l'auteur aborde avec jubilation des sujets variés : l'idée de l'absolu, la tragédie d'Anna Karenine, la poétique de l'excès chez Victor Hugo, les divertissements inspirés par les almanachs, « Parlez-moi d'amour », etc.Le grand érudit qu'est Umberto Eco traite dans ces « écrits occasionnels » de questions qui l'intriguent et le passionnent, sans jamais oublier d'amuser son lecteur.
"... l'intolérance la plus terrible est celle des pauvres, premières victimes de la différence. Il n'y a de racisme entre riches : eux, ils produisent éventuellement des doctrines de racisme ; mais les pauvres en produisent la pratique, bien plus dangereuse.
Les intellectuels ne peuvent lutter contre l'intolérance sauvage, car, face à la pure animalité sans pensée, la pensée est désarmée. Mais il est trop tard quand ils affrontent l'intolérance doctrinale, parce que lorsque se fait doctrine, il est trop tard pour la combattre, et ceux qui devraient le faire en deviennent les premières victimes.
Et pourtant, là est le défi. Eduquer à la tolérance des adultes qui se tirent dessus pour des raisons ethniques et religieuses est du temps perdu. Trop tard. Donc, l'intolérance sauvage se combat à la racine, par une éducation constante qui doit commencer dès la plus tendre enfance, avant qu'elle soit écrite dans un livre, et avant qu'elle devienne une croûte comportementale trop épaisse et trop dure.".
Né à Grlitz, en Silésie, Jacob Boehme - 1575-1624 - fut cordonnier, puis mercier ambulant. Il se comptait parmi les humbles auxquels Dieu accorde des visions. L'une d'elles, en 1600 (il a 25 ans) - en observant le jeu de la lumière sur un pot d'étain - le fit pénétrer dans le mystère des origines. Le problème du mal s'est posé à Boehme dans le contexte du protestantisme de l'époque, luthériens et calvinistes s'affrontant sur le sujet de la prédestination. Héritée de Paracelse, médecin alchimiste qui avait germanisé l'hermétisme de la Renaissance, la notion de signature est fondée, chez Boehme, sur le principe d'analogie : le monde visible est le reflet d'un autre monde, le corps est la figure de l'âme et c'est dans la profondeur de l'âme humaine que le vrai ciel doit être trouvé, car il est la signature de Dieu. Les deux fois nés, seuls, connaissent le vrai ciel. La seconde naissance est celle de Dieu qui s'engendre en chacun de nous, comme il s'est engendré dans le sein de Marie : nous devenons alors la véritable image de Dieu. Mais pourquoi l'homme est-il tombé malade ? C'est la grande question pour Boehme comme pour les cabalistes, à laquelle il consacre le dernier chapitre de son ouvrage.
Comment distinguons-nous un éléphant d'un tatou ? Il s'agit d'un problème philosophique qui a obsédé la pensée humaine depuis Platon jusqu'aux cognitivistes contemporains et que Kant, lui non plus, n'a pas su résoudre ni même poser de façon satisfaisante : la perception que nous avons des choses dépend-elle de la structure de notre appareil cognitif, de la structure de notre appareil linguistique, ou des deux ?
Arrivé à ce point, on voit que les problèmes sémiotiques sont intimement liés aux sciences de la connaissance. Vingt ans après la publication du Traité de Sémiotique générale, Umberto Eco a voulu faire le point et rassembler, en un ouvrage original, l'ensemble de sa réflexion et de son travail. En reprenant les questions de la référence, de l'iconisme, de la vérité, de la perception, et en s'intéressant de près à ce qu'il nommait alors le "seuil inférieur" de la sémiotique, l'auteur pratique une série d'explorations en mettant en scène un personnage souvent négligé : le sens commun.